Comme dans les histoires, où les révoltes sont déclenchées par un impôt injuste levé par un souverain tyrannique et une mauvaise récolte, ici tout commence par une « grogne » populaire contre les taxes sur le carburant [1]… Très vite surgissent des occupations de ronds points aux quatre coins de l’hexagone (contre toute logique géométrique), les radars sont sabotés sur tout le territoire, des blocages massifs ont lieu sur les principaux axes autoroutiers (avec en prime quelques incendies de péages et d’une gendarmerie), les manifestations tournent à l’émeute dans des dizaines de ville et ciblent ce qui peut ressembler de près ou de loin aux sièges du pouvoir gouvernemental ou économique. À Paris, Bordeaux, Toulouse, au Pouzin, à Saint-Étienne, à Caen, Metz, Dijon, Montpellier, au Puy-en-Velay… Ici et là on fraternise presque avec les forces de l’ordre. Ici et là on lynche presque les mêmes policiers et gendarmes. Sans oublier les blocages de zones commerciales juste avant Noël.
À la lisière de l’émeute : l’insurrection manquée
Du jamais vu donc depuis des décennies. Une impression de soulèvement, d’insurrection latente, alimentée par toute l’effervescence des réseaux sociaux et des rencontres tissées dans ces coins improbables transformés en camps de base pour le mouvement : braseros, palettes, discussions à bâtons rompus entre des gens de la rue, des mères au foyer, des auto-entrepreneurs fatigués de s’auto-exploiter. Et paraît-il « 75 % des français qui soutiennent le mouvement ». Avec un pourcentage de bagnoles arborant le gilet jaune qui décolle pour peu qu’on s’éloigne des centre-villes métropolisés.
Début décembre la situation n’est toujours pas sous contrôle. Sur les plateaux télé, on bat le rappel : experts en tout et en rien, et autres universitaires de (basse)cour se succèdent. Les plus bruyants s’étranglent d’indignation et dénoncent la détermination des gilets jaunes, rebaptisée « violence aveugle et anti-républicaine ». Pour faire bonne mesure, ils appellent donc les forces de l’ordre à tirer dans le tas et à parquer les manifestants dans des stades. Remarquable plasticité de la démocratie par gros temps. La gauche se lamente sur l’incompréhension grandissante entre police et population. Et sur le mépris de Macron vis à vis des corps intermédiaires (syndicats, associations) et de leur savoir-faire en matière de pacification sociale. Tout ça oscille entre la satisfaction d’être encore un peu utile au maintien de l’ordre établi et une certaine mélancolie : voilà que la plèbe s’organise par elle-même et fait vaciller le cours des choses...
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