Le père de Léon Herszberg a été arrêté au domicile familial, 8, rue des Bégonias, à Nancy, comme « apatride d’origine russe », le 23 juin 1941. Après un séjour à la prison Charles-III, il a été transféré au camp de Compiègne, avant d’être déporté à Drancy, puis à Auschwitz, en septembre 1942. Cette même année 1942, l’adjoint du responsable du bureau des étrangers à la préfecture de Nancy, Pierre Marie, a donné de fausses cartes d’identité à Léon pour que les deux frères, leur mère et leur grand-mère puissent fuir Nancy et passer en zone sud. Arrêtés, puis emprisonnés à l’hôtel Pax à Annemasse transformé en prison par la Gestapo, en 1944, alors qu’ils tentaient de passer la frontière vers la Suisse avec d’autres jeunes, Léon et Bernard ont été libérés grâce à l’intervention de Jean Deffaugt, maire de la ville.
Léon Herszberg a lutté toute sa vie contre les injustices, contre le racisme et le fascisme. Militant communiste après que les troupes soviétiques ont libéré les camps d’extermination nazis, avant de comprendre que Staline avait trahi la cause, Léon a poursuivi le combat au sein du MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples) à partir des années 1960. Il a participé au lancement du CAFAR (Collectif AntiFasciste AntiRaciste) devenu Ras-l’front au début des années 1990, avec notamment l’organisation d’une manifestation de 10 000 personnes contre la tenue d’un meeting de Le Pen au Parc des expositions à Nancy, en 1992. Léon s’est aussi très tôt impliqué dans RESF (le Réseau Éducation Sans Frontières, qui vient en aide aux familles sans papiers et aux jeunes migrants isolés) et il participait encore aux cercles de silence, il n’y a pas si longtemps.
Sauvé à deux reprises par des Justes, Léon Herszberg estimait que la désobéissance faisait partie des options possibles. Premier signataire au printemps 2008 d’une pétition en soutien d’une femme avec deux enfants cachés par RESF, il l’a annoncé publiquement au micro lors d’un cercle de silence de 500 personnes, place Stanislas, alors que la loi punissait d’emprisonnement l’aide au séjour des étrangers. Comme l’a dit son frère Bernard au cours de la cérémonie d’adieu, le 2 juillet, il y a toujours eu des Justes : ceux qui les ont sauvés, pendant la guerre, et Cédric Herrou ou la capitaine Carola Rackete, qui viennent en aide aux migrants, aujourd’hui.
Léon Herszberg, « Juif et citoyen… », Le Blick du 55, juillet 1997.
Article paru dans RésisteR ! #63 le 5 juillet 2019.
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