Les Faisceaux (FNE) ont été créés en 1980, au démarrage de la dissolution de la "Fédération d’action nationale et européenne" (FANE) de Mark Fredriksen. Cette dernière avait été créée en 1966, notamment par des anciens du groupe "Occident". Un journaliste de l’époque les décrivait ainsi : "Portant chemise brune, les membres et sympathisants du FNE arborent insignes nazis, brassards à croix gammées, drapeaux du IIIe Reich ou tricolores frappés du portrait d’Adolph Hitler" [1]. De braves gars, quoi ...
En juin 1987, deux jeunes néonazis adhérents aux FNE, Philippe D. de Metz (57) et Olivier G. de Meurthe-et-Moselle (54) ont été condamnés, en plein procès Klaus Barbie à Lyon, à un an de prison ferme pour "injures à caractère raciste et slogans faisant l’apologie de crimes de guerre et génocides" [2]. Avec également un jeune mineur lui aussi fan d’Hitler, ils avaient recouvert, quelques mois plus tôt (le 14 février au soir), les murs du centre historique de Metz de croix gammées sur la vitrine de certains commerces, de symboles SS, de slogans racistes et anticommunistes. L’enquête avait montré qu’ils étaient une vingtaine de néonazis dans ce département, se réunissant de temps à autre dans une salle privée à Metz et qu’ils "organisaient des séances d’entrainement en forêt (...) à titre personnel" [2]. A l’audience, leur avocate avait "souligné que quatre mois et demi de prison [en préventive, NDLR] les ont aidés à changer d’optique". Ah c’est sûr, elle était visionnaire elle ...
Autre réjouissance néonazie et mêmes embrouilles : le Parti nationaliste français et européen (PNFE). Il a existé un peu plus d’une dizaine d’années en France et "a rempli, à partir de 1985, le rôle joué par la FANE dans les années 70, en tant que principal mouvement néonazi en France. Il a attiré vers lui les durs de l’extrême droite dont une partie de la mouvance skin." [3] Il a été créé en avril 1987, par Claude Cornilleau, un ancien membre de l’OAS, ensuite passé par le FN et le RPR. Le PNFE est issu d’une scission du Parti nationaliste français (PNF), datant de 1985. Il a ensuite été renforcé par l’arrivée de militant.es des "Faisceaux nationalistes européens" (FANE puis FNE) et de membres du syndicat de policiers de la "Fédération professionnelle indépendante de la police" (FPIP). Son discours était clairement raciste, nazifiant et antisémite. De plus, ses militant.es étaient parfois habillé.es en uniforme, chemise brune et brassard rouge à croix celtique. En France, les faits d’armes du PNFE ont souvent eu l’odeur des explosifs : attentat à Cannes contre un foyer de travailleurs maghrébins en mai 1988 (quatre blessés), attentat contre le mensuel "Globe" à Paris fin juillet 88, attentat contre un foyer de travailleurs maghrébins à Cagnes-sur-Mer en décembre 1988 (un mort et quinze blessés). Mais aussi la profanation très médiatisée du cimetière juif de Carpentras en mai 1990, par quatre naziskins, dont deux membres du PNFE, ou enfin, dans différentes villes de France, de multiples agressions d’"opposant.es" (communistes, homosexuel.les, étranger.es, punks, etc.). Rappelons aussi que Maxime Brunerie, l’apprenti tueur de président de la république (Jacques Chirac le 14 juillet 2002), avait commencé sa vie de nationaliste au PNFE, alors moribond [4].
Une beuverie nazie puis une attaque dans le nord de la Moselle
Dans l’Est de la France, une section du PNFE existait aussi à Strasbourg sur la même période. "Des liens très étroits sont noués entre la section du PNFE de l’Est de la France (Strasbourg, Metz) et ses voisins allemands" [5]. De plus, le PNFE avait tenu son congrès en avril 1993 dans le château de Vellexon-Quetrey-et-Vaudey en Haute-Saône [6], chez nos voisin.es franc-comtois.es.
Le 7 octobre 1989 au soir, plusieurs néonazi.es, membres ou sympathisant·es du PNFE, du FN et du NPD ("National Demokratische Partei" allemand), se retrouvent pour une soirée bière et baston, chez une jeune mineure, dans la banlieue de Metz (57). Autour de la table, invité.es par un membre du PNFE de Metz, huit militant.es français.es (dont une jeune femme de 17 ans) et cinq militants allemands, tous entre 19 et 23 ans : trois militaires français basés à Metz, un militaire allemand, deux étudiants (dont un installé en Meurthe-et-Moselle), des ouvriers, des employés et des chômeurs. Selon certains des avocats, un des naziskinheads français condamnés était un informateur des Renseignements généraux. Abreuvé.es toute la soirée de haine, de bière, de musique du IIIe Reich et de films de propagande hitlérienne, ils sont allés défoncer à coups de rangers coquées, nunchaku et poings américains des jeunes sortant d’un concert punk à Audun-le-Tiche (à 60km au nord de Metz, près de la frontière luxembourgeoise). Trois jeunes fêtard.es avaient été fortement blessé.es et hospitalisé.es. Inculpés de "coups et blessures volontaires avec préméditation", ces naziskins ont tous été condamnés, de 12 à 24 mois de prison, parfois avec une partie de sursis.
Dans cette histoire, l’un de ces condamnés, le messin Philippe D., déjà jugé deux ans avant cette affaire (cf. supra), était tout de même membre du bureau politique du PNFE. Pas un simple adhérent donc... Et dans les années 90, cette section locale du PNFE-Metz, nommée "Thor", éditait le fanzine antisémite et raciste "Niebelungen".
Mark Fredriksen aussi dans les Vosges
Enfin, n’oublions pas la venue du fondateur de la FANE, Mark Fredriksen, chez nos voisin.es vosgien.nes (88), en décembre 1999, pour assister et prendre la parole lors du même type de soirée faite de bière, de chansons antisémites [7], de drapeaux à croix gammées et de saluts nazis, à laquelle avaient participé environ 80 nazillons lorrains, mais aussi suisses et allemands et surtout une poignée de responsables locaux (dont le conseiller régional Jean-Louis D.) du Front national des Vosges et du FN de la jeunesse [8]. Etaient aussi présents à cette soirée raciste et antisémite, Gaëtan D. un jeune responsable parisien du GUD (toujours actuellement engagé à l’extrême droite) et Henri C. un autre responsable plus âgé du PNFE. Mais ce sont bien des membres du FNJ local qui en étaient les organisateurs. Cédric B., l’un des organisateurs, avait tout de même précisé que cela "se situait en dehors du cadre de ce parti (...) entre gens du même bord politique". Ce brave Cédric B., membre du FN et du DPS, le service d’ordre du parti lepéniste, déjà condamné à plusieurs reprises, était auparavant adhérent du PNFE et proche de la FANE [9]. Lors d’une perquisition à son domicile, la gendarmerie avait retrouvé des explosifs (un pain de TNT et son système d’allumage), des munitions et plusieurs armes blanches [10]. Quatre naziskins et deux politiciens avaient été inculpés et seulement quatre avaient été condamnés, en février 1990, pour "provocation à la discrimination raciale" à 18 mois de prison et cinq ans d’inéligibilité. Puis en juin 1990, leurs condamnations avaient été confirmées en appel [11].
Extrême droite armée, PNFE et néonazis, la région Lorraine n’a malheureusement jamais été très tranquille...
BAF-Nancy (Bloc antifasciste)
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