Une école numérique : égalité et liberté ? Attention danger !



L’école 2.0 est en marche, et le tout numérique semble parfois s’imposer comme une évidence, gage d’égalité, de progrès… Pourquoi pas ? Nous sommes en 2021, il faut évoluer… Peut-être, mais la liberté pédagogique, une certaine indépendance de l’école face aux entreprises privées, ça existe aussi, on est d’accord…

Ici et là, des exemples qui amènent à réfléchir… Des IEN qui amènent des écoles à s’abonner à One… « Allez-y, de toute façon c’est gratuit la première année ! »… Et après ? Après, on verra… Et même si One amène de belles possibilités, on ne le nie pas, tout n’est pas non plus sans danger…. One n’est ni un organisme public ni une asso’… Derrière se cache ‘’Open Digital Education’’, une start up créé en 2011 par deux jeunes français… Et la start up grandit... En 2018, le fond d’investissement Educapital y investit 2 000 000€… Bien vu... L’entreprise est rentable... Son chiffre d’affaire en 2019 : 3 382 500€ ! Et il grandira encore… Et la concurrence, dans tout ça ? Pas grand-chose, puisque One semble avoir été adoubé par les hautes instances de l’Éducation Nationale… C’est forcément un risque, lorsqu’on place une partie de l’école dans les mains du secteur privé, qui plus est en monopole… Quid du coût, dans deux ans, dans trois ans ? De la liberté de chaque enseignant·e de choisir ses outils ? Quid du parent qui n’a pas un smartphone bien perfectionné, ou qui ne va pas se connecter sur One ? Cela suscite bien des interrogations, qu’on doit garder en tête… Ne soyons pas contre le progrès, mais ne soyons pas non plus des moutons mal informés ! Chacun·e est libre de ses outils… Manuel papier ou numérique, One ou cahier de texte, un E.N.T. concurrent, chaque enseignant·e doit rester libre de ses choix…

Et le plaisir d’une affiche que l’on touche, du manuel que l’on feuillette, du livre que l’on peut ramener à la maison, du cahier de textes où l’on colle un mot, et le plaisir d’avoir le choix, tout simplement…. Ça ça n’a pas de prix… Et ça, dans cette époque où tout en a un, même les parts de marché que revend l’Éducation Nationale à notre chère start up, c’est peut-être un luxe que l’on ferait bien de préserver… Sans refuser le numérique pour autant, mais avec liberté de choix et de pensées ! Et si on choisit des outils numériques, privilégions les logiciels libres ou open source, plus sécurisés, respectueux de la vie privée et non liés à des grands groupes capitalistes.

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CLASSES VIRTUELLES, LA PANACÉE !

Depuis le confinement, la part belle a été faite au numérique. C’était la technologie qui allait sauver l’Éducation nationale et permettre la « continuité pédagogique » si chère au cœur de notre ministre. Avec le second confinement, la classe virtuelle a été présentée comme une évidence dans certains établissements, l’outil incontournable sans lequel tout·e prof serait un dinosaure, une vieille croûte.

La classe virtuelle n’est qu’un maigre palliatif qui ne remplacera jamais le contact direct du professeur·e avec sa classe. D’un point de vue technique, c’est un outil dont la pratique reste aléatoire : les problèmes de connexion sont une réalité, les plateformes sont parfois saturées, et il faut gérer, lorsque les classes sont en demi-groupe, les élèves dans la classe et celles et ceux en « distanciel ». Mais le plus important, c’est qu’il s’agit d’une technologie qui creuse l’inégalité entre nos élèves ; nous savons bien que toutes et tous n’étudient pas dans les mêmes conditions chez eux. Et ce n’est pas le fait de voir son professeur·e à l’écran qui permet un meilleur apprentissage.

Liberté pédagogique ! Voilà le maître-mot ! Entre injonction hiérarchique, regard des collègues, attente des parents, parfois des élèves, les enseignant·e·s sont sous pression. Mais ils et elles sont les mieux placé·e·s pour savoir comment faire travailler et progresser leurs élèves. Laissons-leur le choix de leurs méthodes de travail et faisons leur confiance !

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Article paru dans SUD éducation Lorraine Info n°42, janvier 2021