Sursaut solidaire envers des militant·es menacé·es

Rosselange (57) |

L’appel aurait pu être plus large, mais 400 citoyens se sont rendus le samedi 8 mai à Rosselange (Moselle) pour exprimer leur soutien à Xavier et Rose-Marie. Ces figures locales de la solidarité envers les réfugiés ont fait l’objet de menaces de mort.

Révélées début mai, les menaces de mort anonymes dont ont fait l’objet Xavier et Rose-Marie, figures locales de la solidarité envers les migrants, ont atterré les nombreux citoyens qui tiennent le couple de militants en haute estime. Ce 8 mai, 400 personnes ont rejoint la manifestation organisée devant la mairie de la petite ville ouvrière de Rosselange (Moselle). Ce soutien a apporté un bol d’air pur dans les miasmes d’une campagne électorale obsédée par la stigmatisation de l’étranger.

La CGT, le FSU, Solidaires, la CFDT, la CNT, la Ligue des droits de l’Homme, le MRAP, le PS, le PCF, EELV, Génération. S, Génération Écologie, LFI, les Frontaliers et l’OGBL ont cosigné un texte salutaire. Lu par Jacques Maréchal, secrétaire départemental du PCF en Moselle, le propos n’élude ni les violences des groupuscules d’extrême droite, ni celle d’un Etat indifférent aux noyades en Méditerranée. Rappelant que les citoyens solidaires sont poursuivis non seulement par la hargne raciste, mais aussi par les tribunaux, les signataires revendiquent le principe de solidarité, rappellent que toutes les institutions devraient se rassembler pour soutenir des militants exemplaires et espèrent que leur plainte ne sera pas classée.

Ce n’est pas pour se plaindre, mais pour faire face à ses détracteurs anonymes que Xavier prend ensuite la parole. Il ne cite que les extraits – les plus soft, assure-t-il – de la missive qui promet au « sale chinetoque » de brûler sa maison au prochain tract, l’accuse de nourrir la racaille plutôt que les étudiants français, applaudit la police et promet que Marine Le Pen arrivera bientôt et qu’il sera « rayé ». Ouvrier sidérurgiste en retraite, Xavier n’est pas un tribun. Mais il trouve une flamme d’orateur quand il rétorque qu’il se bat contre la misère, quelle qu’elle soit. Il rappelle l’un des drames tout frais de la vallée de l’Orne, une famille albanaise raflée au petit matin, expédiée à Meuse TVG en direction de Roissy et éjectée le soir même vers son pays d’origine.

Atteinte d’un cancer, la mère de famille venait pourtant de déposer une requête, que la préfecture a rejetée. « On ferme les yeux sur cette violence. Les lois votées contre les réfugiés sont de plus en plus graves et durant cette campagne, on va maltraiter les migrants pour gagner des voix », prévient Xavier.

Le militant évoque avec pudeur Rose-Marie, son épouse depuis 44 ans. Ils se sont retrouvés sur des valeurs de respect, d’égalité, de révolte contre les injustices et le capitalisme. Mais ce matin, Rose-Marie n’est pas là. Cette femme lumineuse dont nombre de réfugiés ont pu apprécier la gentillesse et le courage, a été chamboulée par la bouffée de haine lâchement déposée à son adresse.

Famille, amis de toujours, camarades syndiqués, camarades du Parti, élus, voisins, familles étrangères soutenues, militants antiracistes et citoyens solidaires ont exprimé à Xavier et Rose-Marie une solidarité massive. Soixante-six ans après la victoire des Alliés contre l’Allemagne nazie et de la répression concomitante des émeutes de Sétif, la Chorale révolutionnaire, groupe vocal mosellan peu prisé de la Préfecture, s’est installé sur le parvis de la mairie de Rosselange. Les choriste et l’assistance ont entonné Bella Ciao, écrit en 1944, puis l’Internationale, composée voici 150 ans durant la Commune de Paris. Entonnés sous un ciel assombri et quelque peu pluvieux, ces chants évoquaient à la fois des temps durs et la persistance de la flamme en dépit de vents mauvais.

Pascale Choisy