[Nancy] Retour sur un an de violences d’extrême droite à Nancy

Nancy (54) |

Des mois et des mois que des bandes de fascistes violents prennent la confiance dans les rues de Nancy. Des militant.es et des habitant.es se font menacer, insulter, agresser. Y a-t-il quelqu’un pour les stopper ?

Cela fait environ un an et cela commence à nous fatiguer sérieusement. Cela fait donc un an que les fachos locaux se croient autorisés à défiler et chasser dans les rues de Nancy, de jour comme de nuit. A s’entrainer aux sports de combats (et l’afficher publiquement), circuler en petits groupes et frapper sur qui bon leur semble : étudiant.es, jeunes de gauche, antifas, personnes au look queer, syndicalistes, etc. Des nationalistes cagoulés aux gants coqués, souvent bien jeunes, entre 15 et 30 ans. Et parfois même des adolescents, au look de méchant skinhead old-school, un poing américain bien serré au creux de la main, mais avec une tête de gamin boutonneux.

Le 11 juin 2024, une manifestation populaire contre les scores très inquiétants du Rassemblement national arpentait les rues de Nancy. Une quinzaine de nervis d’extrême droite, des jeunes nationalistes radicaux, des royalistes de l’Action française Nancy et des supporters ultras de l’ASNL, provoquaient une partie des manifestant.es, dans une rue de la vieille ville. Ils ont violenté plusieurs personnes à coups de ceinturons avant de se réfugier dans les bras d’une unité de CRS, ces derniers bienveillants d’un côté avec eux et de l’autre gazant les manifestant.es qui venaient pourtant de se faire attaquer sous leurs yeux [1]. Quasiment tous les assaillants ont été identifiés [2] mais la justice ne bouge pas. Tranquillou les néonazis... Une situation ubuesque !

Les troupes de l’Active club Nancy-Lorraine organisent des chasses aux gauchistes dans les rues de Nancy (ici début juillet 2024)

Puis le 30 juin suivant, une petite cinquantaine de jeunes nationalistes locaux, drapeau tricolore entre les mains, a paisiblement circulé dans le centre-ville de Nancy, scandant des slogans haineux et provocateurs. "Europe, jeunesse, révolution", "Nancy est nationaliste" ou "La France la rue nous appartient", hurlaient-ils, sillonnant, cagoulés, les rues nancéiennes à la chasse aux gauchistes qui s’inquiétaient et manifestaient contre les scores de l’extrême droite [3]. Sur cette même période électorale, le groupuscule fascisant "Active club Lorraine", dont sa section Nancy, organisait également des descentes dans le centre-ville à la recherche d’ennemi.es, de violences, de tabassages. L’Active club local s’est structuré au cours du premier semestre 2024, bien porté au démarrage par l’association vosgienne et également fascisante "Au four et au moulin" et son leader quarantenaire Julien Chivoret, un ancien militant du GUD-Nancy (1ère génération, fin des années 90), condamné par la justice à plusieurs reprises pour provocation à la haine raciale (novembre 2001 [4]) et pour violences (juin 2013 [5]). Ajoutons que quelques nationalistes de l’Active club lorrain et de "Au four et au moulin" sont visiblement allés parader à l’insupportable défilé néonazi C9M, à Paris, le 10 mai 25 [6]. Des jeunes identitaires vosgiens de Voségus (ex "Division Arès") étaient également dans ce défilé parisien.

Coups, violences gratuites et menaces en tout genre

Le 5 janvier 2025, comme tous les 5 janvier depuis environ quarante ans, les fachos et réacs locaux se retrouvent place de la Croix de Bourgogne pour fêter lors d’une harangue la victoire de René II, duc de Lorraine, sur les troupes de Charles le Téméraire, duc de Bourgogne. Au-delà des poussiéreux royalistes et catholiques traditionalistes locaux (comme par exemple Jean-Marie Cuny et Philippe Schneider), depuis plusieurs années, les jeunes fascistes lorrain.es s’y pressent : la jeunesse de l’Action Française Nancy et Metz, les nationalistes vosgien.nes de "Au four et au moulin", les militant.es nationalistes-révolutionnaires de "Alérion" (Thionville), les bagarreurs de l’Active club de Lorraine, les identitaires d’Aurora Lorraine, etc. Grâce notamment à la pression des antifascistes locaux.ales, le tribunal administratif a interdit le défilé aux flambeaux, prévu pour l’occasion [7] par Aurora, également déclaré par un jeune homme, par ailleurs salarié du diocèse catholique de Nancy et Toul et soutenu, notamment financièrement, par les identitaires de l’ASLA (Association de Soutien aux Lanceurs d’alertes), comme ils avaient déjà soutenu la librairie réactionnaire "Les Deux Cités". Le traditionnel rassemblement statique place de la Croix de Bourgogne a tout de même été maintenu, en présence d’une petite centaine de vieux réacs et de jeunes fascistes.

Les gars de l’Active club Nancy-Lorraine aiment se battre, boire des bières au Mac Carthy et surtout faire des saluts néonazis de Kühnen à 3 doigts (photo : sept 2024 + 5 janvier 2025)

Depuis, le 17 mars dernier au soir, un étudiant qui sortait de la faculté des lettres s’est fait tabasser par plusieurs militants nationalistes, avec cagoules et gants coqués, alors que ces derniers étaient en train de coller des stickers de l’Action française dans le quartier [8]. L’étudiant violenté a anonymement témoigné de cette lâche attaque et de ces menaces de mort [9]. Des plaintes ont été déposées par l’étudiant agressé et l’université également. Une enquête policière semble en cours.

Enfin, le 7 mai au soir, deux artistes chorégraphes ont elleux aussi été agressé.es par une bande de jeunes fachos, dans une rue de l’hypercentre de Nancy. Le couple sortait d’un spectacle et rentrait chez lui. Sans qu’on en comprenne la raison, une dizaine de personnes cagoulées et vêtues en noir les ont poursuivi.es jusque chez elleux, menacé.es et insulté.es : "sales antifas", "salope", "On sait où vous habitez !". Les jeunes fascistes ont signé leur agression par les autocollants "Action française" et "Europe, Jeunesse, Révolution" apposés sur la porte de leur domicile. Le couple a témoigné suite à cette agression [10]. Pour cette agression une enquête policière semble aussi en cours.

Interrogée, la préfecture de Meurthe & Moselle, a rassuré tout le monde : "Rien dans les données statistiques dont nous disposons ne laisse actuellement penser à une recrudescence de ce type d’agressions idéologiques". Ce que ne semble pas du tout partager le quotidien Libération qui titrait mi mai : "Agressions, attaques et intimidations : en France, les groupes d’extrême droite se déchaînent depuis début 2025". En expliquant qu’il a bien "un retour en force de la violence politique depuis quelques mois, avec peu de réactions des autorités" [11]. L’une et l’autre n’ont visiblement pas du tout les mêmes statistiques. En tout cas, pour nous, il faut que cela cesse sans tarder !

Bloc antifasciste Nancy (BAF)

P.-S.

Photo de tête : L’Est républicain (30 juin 2024)