Procès du cofondateur de 269 Libération Animale, qui risque la prison pour « outrage au maire »

Nancy (54) |

Depuis l’installation du sanctuaire du collectif "269 Libération Animale" dans une petite commune de Meurthe-et-Moselle, l’ensemble des autorités étatiques du département n’ont de cesse d’attaquer ce territoire de lutte, le collectif et ses fondateurs devenus des "cibles" en raison de leur stratégie d’action directe et des idées politiques qu’ils défendent.

Lien vers l’événement sur Facebook (y sont mentionnés tous les renseignements concernant le rassemblement de soutien) : https://www.facebook.com/events/2139842889517824

Depuis août 2019, notre sanctuaire est installé à la lisière d’une petite commune de Meurthe-et-Moselle nommée Manonville. La S.A.F.E.R. - organisme d’Etat sous tutelle du Ministère de l’Agriculture - nous ayant empêchés de mener à terme notre projet d’acquisition, nous y louons par le biais d’un bail agricole un terrain d’une superficie de 7 hectares. Nos débuts dans ce nouveau secteur géographique ont été particulièrement difficiles et éprouvants du fait de l’acharnement non dissimulé des autorités locales à nous faire renoncer au projet et à partir. Le moins que l’on puisse dire c’est que notre arrivée dans le département dérangeait, les attaques avaient commencé alors même que nous n’avions pas encore déménagé puisqu’un avis défavorable à notre venue avait été rendu par le conseil municipal avant que nous posions le premier piquet... Une réunion de crise s’était également tenue à la Préfecture du 54 avec les représentants des syndicats agricoles et le propriétaire du terrain (évidemment nous n’y avons pas été conviés), réunion au cours de laquelle nous avons été qualifiés de « dangereux extrémistes de gauche ». Il est clair que nos idées politiques comme notre stratégie de lutte ont fait de nous une cible.

Mais outre ces attaques émanant directement des autorités étatiques, c’est aussi un climat de malaise et de tension qui s’est lentement installé - et perdure aujourd’hui encore - au sein même de la commune où se trouve le sanctuaire du collectif. Ceylan Cirik et Tiphaine Lagarde, cofondateurs de 269LA, y vivent avec une cinquantaine d’animaux libérés. Le plus regrettable c’est que ce climat détestable n’est pas de la responsabilité des habitants du village avec lesquels nous avons fort peu de contacts et aucun problème relationnel particulier, mais de celle d’une seule personne, un chasseur devenu aujourd’hui maire, qui ne cesse de témoigner sa haine envers les idées que nous portons et nos personnes depuis 2019.

Les menaces ont commencé alors que nous étions en plein travaux sur le terrain puisque cette personne s’est octroyée le droit de venir nous insulter dès le premier jour tenant un discours nauséabond abondant de préjugés et propos racistes à peine dissimulés ; puis les mois suivants nous avons assisté à une série de provocations lors des parties de chasse organisées à proximité du sanctuaire.
Les bénévoles qui viennent régulièrement nous aider ont assisté à ces actes particulièrement lâches et peuvent en témoigner. Malgré le calvaire enduré, nous n’avons jamais répondu directement ou indirectement, préférant nous préserver et surtout protéger les animaux qui vivent avec nous.

Nous avons appris plus tard que le terrain que nous louons était une zone particulièrement appréciée des chasseurs du coin : en effet, les animaux sauvages qui venaient naturellement s’abreuver à la rivière bordant le site et à l’étang qui se trouve sur la propriété étaient des « cibles faciles ».

Jusqu’à l’été 2020, nous attachions peu d’importance à cette situation que nous assimilions à un énième conflit entre des antispécistes et des chasseurs, conflit presque inévitable en zone rurale. Nous vivions avec, sans chercher à répondre aux provocations.
Mais depuis l’élection de cette personne comme maire en 2020, les choses se sont aggravées puisque cette position lui octroie des pouvoirs et un statut dont il fait usage pour assouvir sa haine contre nous.

Si des efforts vers une médiation ont été entrepris au début de son mandat, ils n’ont pas duré et rapidement la situation s’est envenimée.
Ainsi après une réunion à la mairie et un accord obtenu du conseil municipal pour que nous puissions obtenir le raccordement au réseau d’eau courante, le maire est revenu sur sa décision pour nous refuser le projet sans même daigner nous fournir la moindre explication.

Nous sommes traités comme des « sous-habitants », des parias et marginaux qu’on ignore et à qui on ne parle jamais directement mais uniquement par l’intermédiaire de la police.
Tout a été mis en œuvre depuis pour nous faire comprendre que nous sommes indésirables sur la commune et nous rendre le quotidien insupportable.
Ainsi usant de son autorité, le maire a fait déplacer la police à de multiples reprises dans l’espoir de nous faire sanctionner pour des faits complètement mineurs et ce sans nous avoir parlé au préalable ni tenter la moindre médiation.
C’est ainsi qu’après nous avoir autorisés devant témoins à poser quelques branches et troncs sur la rivière pour servir de "reposoir" aux canards du sanctuaire qui y passent beaucoup de temps, il a fait intervenir la police de l’environnement dans l’unique but de nous voir verbalisés (évidemment sa tentative a échoué faute d’infraction tant sa démarche était ridicule) ; il a également fait intervenir la police pour une caméra que nous avions placée au-dessus de notre boîte à lettres suite à de multiples actes de malveillance et dégradations, etc.
Jamais il n’est venu nous parler directement au sujet de ces divers problèmes comme est censé le faire un maire et on peut s’interroger sur ses réelles motivations qui semblent bien éloignées de sa mission de servir "l’intérêt général".

Il se cache derrière son titre pour nous provoquer constamment et susciter une réponse de notre part sachant que nous sommes sous des régimes de sursis probatoire en raison de nos diverses actions militantes menées contre le système d’exploitation animale. Il sait qu’en cas de condamnation pour une nouvelle infraction, nous serions susceptibles de devoir effectuer nos peines de prison. Il nous l’a fait expressément savoir en tenant ces propos à l’égard de Ceylan : "Ne joue pas au c**, tu vas te retrouver derrière les barreaux !".

En automne 2021, après une partie de chasse dans la forêt qui se trouve à côté du sanctuaire, il s’est permis de venir jusqu’au portail du refuge nous accuser à tort d’avoir dégradé son panneau de chasse (alors que nous subissons la vision de leurs pratiques cruelles depuis 3 ans sans jamais rien avoir entrepris contre les chasseurs ou leur matériel) puis nous a insultés comme à son habitude dans l’unique but de déclencher une réaction de Ceylan.

Lâchement, une fois sa haine déversée, le maire a commencé à filmer la réponse verbale de Ceylan. Évidemment, ses mots n’ont pas été sympathiques et il les regrette mais ils ne sont que le triste résultat d’une « patience à bout » après des années de provocations et d’attaques.
Ceylan avait déjà déposé une main courante à la gendarmerie pour insultes à caractère raciste puisque le maire a fait usage à plusieurs reprises de propos de cette nature (du type « on est chez nous ici sale kurde » et autres) mais évidemment faute de preuves et de motivation, il n’y a jamais eu de suite judiciaire.

Ce jour-là, le maire a donc volontairement filmé Ceylan en train de proférer des insultes, des insultes qu’il a lui-même provoquées : c’est un véritable piège qui a été orchestré dans l’unique but de pouvoir déposer une plainte. Profitant du fait qu’un maire insulté est désormais un « maire outragé » au regard du droit pénal, il s’est évidemment empressé d’aller à la gendarmerie la plus proche. Quelle belle occasion pour lui !

Cette plainte (et surtout sa qualification judiciaire) est scandaleuse puisque durant cette scène montée de toute pièces, cette personne n’agissait absolument pas dans le cadre de ses prérogatives de maire mais comme chasseur ! L’article 433-5 du code pénal est très clair : « constituent un outrage les paroles (…) adressés à une personne chargée de mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission ».

Ceylan n’a pas insulté le maire mais un chasseur venu porter des accusations mensongères !
Comment la qualification légale d’outrage au maire a-t-elle pu être reconnue dans ces circonstances ? C’est parfaitement injuste et totalement incompréhensible.
Au regard des faits dont la présentation est complètement instrumentalisée par l’une des parties mais aussi de l’acharnement subi depuis 3 ans, le climat de tension n’aurait pas du être ignoré dans la réponse judiciaire.

C’est une "simple" perte de sang-froid que le maire instrumentalise volontairement sachant que pour ces mots, Ceylan risque la prison ferme.
Les insultes ont été provoquées, elles n’ont rien de spontanées.
Ceylan a été poussé à bout par un maire qui joue sur ses privilèges et une violence symbolique pour en permanence nous faire se sentir « indésirable ».
Derrière ce fait banal, se cache aussi une illustration des préjugés racistes que subit Ceylan. Cette affaire n’est rien d’autre qu’une instrumentalisation des privilèges d’un homme blanc jouissant d’une certaine autorité.
Il compte sur le fait que Ceylan soit une personne racisée perçue donc comme impulsive et "barbare", une personne issue des quartiers populaires avec tous les préjugés que cela véhicule (notamment être qualifié de "délinquant de naissance") et qu’il n’ait pas les codes légitimes pour être pris au sérieux par la justice et qu’il soit perçu comme une personne "non civilisée" dans la commune.

Evidemment "la violence" que veut bien voir la police et la justice, c’est toujours la violence visible qui vient d’en bas. Celle de Ceylan qui répond à des années de provocation, celle des personnes racisées qui un jour se rebellent contre la police, celle des syndicalistes qui arrachent la chemise d’un cadre d’Air France, des Gilets jaunes qui élèvent des barricades devant des vitrines brisées de boutiques de luxe, des activistes qui bloquent un abattoir et libèrent des animaux. Mais c’est un choix, de parler de “violence” pour parler de ça – pour ne parler que de ça. Un choix judiciaire, médiatique, politique et idéologique.
On ne parle presque jamais, pourtant, de la violence qui éveille “la violence”. Du climat de haine que l’on subit, de l’acharnement étatique et judiciaire, etc. On tronque le récit au point d’en produire un tout autre : on tient le dernier chapitre pour le début de l’histoire. Il y a donc “la violence” qu’on formule, qu’on dit telle : les dominés qui se défendent face à l’autorité qui les humilie, les dépourvus qui se tournent soudain vers les bien pourvus ; les exploités qui, un jour, disent “stop, ça suffit”. Et il y a la violence qu’on ne dit pas du tout, car c’est le monde comme il va.

Aujourd’hui pour avoir répondu à cette violence là, Ceylan risque la prison.

Il sera assisté à l’audience par Me Thomas Hellenbrand, avocat du collectif depuis 2018.

Nous encourageons toutes et tous les camarades disponibles à venir nous soutenir le vendredi 8 juillet à partir de 8h30 devant le tribunal de Nancy.
Contre l’acharnement judiciaire que subisse les fondateurs de 269LA,
Contre les préjugés racistes,
Soyons nombreux.ses devant le tribunal de Nancy !

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