En réalité, depuis fin 2013 il a permis de préserver moins de 100 000 emplois pour un coût de 48 milliards d’euros ! Le manque à gagner pour l’État a été compensé par des hausses d’impôts pour les ménages et par des restrictions budgétaires, comme ces économies qui vont se traduire par 20 000 suppressions de postes dans les hôpitaux à partir de 2017. Évidemment, tout n’est pas perdu pour tout le monde puisque la France a été classée troisième pays mondial pour la hausse des dividendes versés aux actionnaires en 2015, le patron du Medef, Gattaz, n’étant pas le dernier bénéficiaire de la manne. Et, bien entendu, le dispositif du CICE est reconduit pour 2017, à hauteur de 25 milliards [1].
À côté de cela, les salarié.e.s qui défendent leurs droits et leurs emplois ne sont pas traités de la même manière. Deux à quatre mois de prison avec sursis ont été requis contre cinq salariés d’Air France jugés pour « violences en réunion », pour leur implication dans l’épisode de la « chemise arrachée » du DRH, ainsi que des amendes pour dégradation (jugement rendu le 30 novembre). Les 19 et 20 octobre, ce sont huit syndicalistes CGT de Goodyear qui sont convoqués devant la cour d’appel d’Amiens, après avoir été condamnés à 24 mois de prison, dont 9 mois fermes, pour avoir défendu leurs emplois et ceux de leurs collègues. Et il ne s’agit que des cas les plus emblématiques. Des dizaines de militants ont été condamnés ou sont encore convoqués devant les tribunaux suite aux manifestations du printemps contre la loi Travail, avec face à eux, bien souvent, le témoignage « objectif » des flics au service de l’ordre.
Les classes, ça existe ! La classe dominante tout au moins, dont le maintien au sommet de l’ordre social est garanti par l’appareil d’État, sa justice et sa police, et par tout un tas de gestionnaires, pardon d’hommes et de femmes politiques en CDD renouvelables à chaque échéance électorale. Ces gens-là ont presque réussi à faire croire qu’ils n’existaient plus en tant que classe, qu’il n’y avait plus de classes, plus que des « citoyens », des individus libres et responsables de leur destinée. D’autres sont passés derrière eux qui tentent de convaincre que s’il n’y a plus de classes il y a des nations, des races, des religions, bref des identités auxquelles nous devrions nous raccrocher… Dangereuses foutaises !
Les classes, ça existe ! La nôtre aussi. Elle n’a pas de nationalité ni de frontières, pas de religion ni de couleur de peau. Mais elle n’existe pas comme une chose posée là. Elle n’est pas insubmersible. Elle ne peut exister que si nous le voulons, que si nous la pensons, que si nous nous opposons à ceux du camp adverse qui cherchent à la faire disparaître.
Chaque mobilisation, chaque assemblée générale, chaque manifestation ou sabotage est une occasion de nous constituer comme classe. Chaque lutte peut être une occasion d’exister comme force collective : prête à résister et rendre les premiers coups aujourd’hui et à tout balayer demain.
EzM
Article paru dans RésisteR ! #45 le 29 octobre 2016
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