Léo. On a plus l’habitude de se croiser en manif au Point-Central à Nancy qu’à la porte d’un supermarché. Comment est venue l’idée de créer ce groupe ?
Anne-Lyse. C’est suite à différentes manifs, à diverses discussions, on a vu que la précarité touchait de plus en plus de monde : étudiant·es, salarié·es, chômeur·ses... En même temps, on voit toujours autant de choses à la déchetterie ou abandonnées sur les trottoirs. La phrase « Tout ce qui ne vous sert pas peut servir à d’autres » m’est apparue comme une évidence. J’ai un gros réseau de connaissances, d’ami·es, côté famille, syndicats, Gilets jaunes... Ainsi j’ai créé le groupe Facebook « le bazar à lisette ».
Léo. Il existe pas mal d’associations qui viennent en aide aux personnes les plus démunies (les Restos du cœur, le Secours populaire, etc.). Pourquoi avoir créé une nouvelle association plutôt que d’avoir rejoint une des associations existantes ? Est-ce que vous travaillez avec ces dernières ?
Anne-Lyse. J’ai pris contact avec l’UNEF afin de voir ce dont les étudiant·es manquaient. Les Restos du cœur et le Secours populaire prennent en charge l’alimentaire mais il manquait les produits d’hygiène. J’ai donc lancé une collecte avec mon réseau. Certes, beaucoup de cartons sont arrivés les premières semaines, mais au vu des demandes ce n’était pas suffisant. J’ai donc pris contact avec "Toutes solidaires" et nous avons collecté la semaine suivante au Super U. Pendant cette même période j’ai mis en place un système de troc, d’échange et de dons. Puis avec sept amies Gilets jaunes, nous avons décidé de créer une association de vente, de dons, d’aide aux personnes précaires et fragiles.
Léo. Vous collectez selon les moments des produits d’hygiène et cosmétique, du petit électroménager (fours à micro-onde), maintenant du chocolat. Comment vous organisez-vous pour collecter, redistribuer ? Et pourquoi avoir imposé un prix symbolique à 1€ sur certains échanges ?
Anne-Lyse. Pour les grosses collectes, les produits alimentaires, d’hygiène, les chocolats... nous contactons les supermarchés. Les 1€ ont été mis en place car l’association ne fait pas payer d’adhésion et n’a pas de subvention. Ces 1€ ainsi que les dons faits à l’association permettent de négocier des fours à micro-ondes. Sur Internet nous faisons aussi des courses alimentaires.
Léo. Quand vous intervenez à la porte de supermarchés, est-ce que vous ne craignez pas de faire de la pub à des grands groupes qui font leur beurre sur les licenciements, et finalement sur la misère grandissante dans le pays ?
Anne-Lyse. Depuis le mouvement des Gilets jaunes, nous avons bien pris conscience que nous vivons dans une société de consommation. Certes, la façon de consommer a un peu changé mais il y a encore du travail. Les besoins sont énormes, aussi par la voie des supermarchés nous pouvons faire de belles collectes. La misère grandissante dans notre société est certes due en partie aux licenciements, mais elle est surtout due à un mauvais partage des richesses, aux cadeaux que ce gouvernement fait aux plus riches, au CICE versé sans aucune contrepartie à des entreprises, aux exilés fiscaux pas suffisamment poursuivis, à la suppression de la taxe sur les grosses fortunes...
Léo. Quel est l’objectif de la campagne du 3 avril. On a entendu parler de 500 œufs en chocolat. Mais est-ce que ce ne sont pas les cloches qui les apportent ? Et vous prenez aussi les lapins ?
Anne-Lyse. L’objectif du 3 avril pour cette collecte de chocolats au Match de Saint-Max de 9h à 17h, c’est que chacun des enfants des trois associations que je vais vous citer ait son chocolat pour Pâques. Première association, J-B Thiéry installée à Maxéville, c’est un IME qui accueille des enfants autistes et polyhandicapés. Enuite ASLV, une association spécialisée dans l’accueil des personnes vulnérables, plus particulièrement déficientes intellectuelles, tout au long de leur parcours de vie, sur les temps libres, vacances ou au quotidien, 250 enfants et adultes. Enfin, REALISE et MECS, maison d’enfants à caractère social, qui accueille notamment des enfants placés suite à des violences physiques, sexuelles ou psychologiques, environ une soixantaine d’enfants. Sinon des œufs ou des lapins ? Les lapins sont attendus en espérant qu’ils ne nous seront pas posés ! Nous espérons que vous serez au rendez-vous. Mais vous pouvez aussi nous contacter avant le 3 avril pour nous remettre des œufs. Merci.
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