L’auto-organisation partout, pour la défense des retraites et la conquête de nouveaux droits !



Pas de scoop mercredi 26 octobre : Macron a confirmé son attaque pour dégrader nos droits à la retraite. C’est par le biais d’un recul de l’âge de départ qu’il veut y parvenir, recul progressif, 4 mois par année, c’est-à-dire 63 ans en 2025, 64 ans en 2028 et 65 ans en 2031.

Les fonctionnaires titulaires et les actuel.le.s salarié.e.s des entreprises à statuts bénéficiaires de « régimes spéciaux » verraient leur retraite inchangée quant au montant (75% du dernier brut pour carrière pleine, en fait du meilleur salaire atteint). Il s’agit là d’une claire tentative d’isolement de celles et ceux qui se sont particulièrement mobilisé.e.s en 2003, 2010 et 2019/20 et bien sûr avec les plus grandes incertitudes sur le long terme. La perspective est explicitement tracée de disparition des « régimes spéciaux » puisque les salarié.e.s recruté.e.s à partir de 2023 dans ces entreprises se verraient appliquer les règles du privé, règles très dégradées de longue date (calcul sur les 25 meilleures années depuis 1992). Les fonctionnaires seraient alors totalement isolés ouvrant ainsi la possibilité en décalé d’une attaque frontale contre le statut de la Fonction publique. Pas de scoop dans l’argumentaire, que du classique, la guerre en Ukraine, la crise de l’énergie et le COVID venant seulement renforcer le caractère « incontournable des difficiles mesures » annoncées. « Nous ne sommes plus dans le monde d’avant » dit-il encore.

Macron dit qu’il reste beaucoup à discuter, carrières longues et pénibilité notamment… Les carrières longues, carrières commencées avant 20 ans vont concerner de moins en moins de personnes, les discussions autour de ce thème sont à haute teneur idéologique permettant à Macron, au patronat mais aussi au RN de se répandre en bons sentiments et d’attiser les divisions. Quant à la pénibilité, qui ne voit que les discussions ne régleront rien, qu’elle ira croissant avec les nouvelles mesures et le management néolibéral si brutal ?

Sur le fond de la réforme, si la réforme systémique – la retraite à points – n’est pas mise sur la table, son esprit n’est pas loin : nous sommes clairement dans l’idée d’un système contributif – je cotise, j’ai droit à du différé – à l’exact opposé du principe du régime général, de celui de la pension des fonctionnaires, des régimes spéciaux, du principe de la retraite comme salaire qui continue sur la base du meilleur salaire atteint.

Quelle riposte syndicale ?

L’intersyndicale nationale large avait produit le 4 octobre un communiqué sur une ligne générale « d’opposition à toute nouvelle dégradation de nos droits » [1]. Le texte unitaire, s’il a le mérite de mettre en évidence l’unanimité syndicale à ce stade contre Macron, signifie aussi l’acceptation et la légitimation de toutes les dégradations antérieures. Aussi, nous ne pouvons nous en tenir à cette ligne de défense. Il est impératif que l’intersyndicale de l’hiver 2019/2020 – CGT, FO, FSU, Solidaires et organisations de lycéen.ne.s et étudiant.e.s – se remette en ordre de bataille. Et si de réelles possibilités d’élargir ce front syndical se font jour, Sud Educ Solidaires fera tout pour les concrétiser.

Quelles revendications ?

Dans le grand bouillonnement politique du 1er semestre – séquence présidentielle et législatives –, avec celui d’une augmentation générale des salaires, le retour à la retraite à 60 ans a été un thème très important porté par l’Union populaire puis la NUPES. Cette proposition rejoint pleinement nos revendications syndicales. Mais elle a besoin d’être précisée : « Retour à la retraite effective pour toutes et tous à 60 ans, à taux plein. » Dans la bataille qui s’engage, ces questions doivent être débattues en toute clarté, elles sont capitales. L’écart entre femmes et hommes concernant le salaire se trouve largement accentué au moment de la retraite : l’égalité Femmes/Hommes tant dans le salaire que dans la retraite doit s’imposer. Pour rendre effectif le droit à la retraite à 60 ans pour toutes et tous, un autre problème doit être réglé : une année d’études doit valider une annuité de retraite ! La revendication de la reconnaissance du travail des étudiant.e.s à travers du salaire fait son chemin et a partie liée avec la bataille des retraites.

Plus globalement, nous devons engager le débat de l’unification générale du système de retraite, public et privé. La matrice serait le régime général, la pension des fonctionnaires, les régimes dits spéciaux, avec en leur centre le principe du salaire continué. La simplification serait totale. Et la situation de toutes et tous serait tirée vers le haut à l’opposé du « système universel » de Macron qui dégrade « universellement » la situation avec son principe « j’épargne pour moi plus tard » !

Evidemment, avec un nombre de retraité.e.s qui augmente, il faut augmenter le financement du système. Un tabou doit être cassé : le taux de cotisation retraite, bloqué depuis 1979, doit être augmenté. Un nouveau taux, taux unique, doit être fixé et étendu à la plus-value des entreprises. Il faut imposer la fin des dégrèvements de cotisations sociales.

Et discutons du choix des investissements, du choix des productions, des conditions sociales et écologiques de la production devrait être débattue.

Comment s’organiser pour mettre Macron en échec ?

Nous pouvons gagner, Macron est détesté, ses mesures régressives encore plus ! L’intersyndicale a un rôle central à jouer, mais, pour gagner, le mouvement doit s’ancrer dans le pays. Si la grève est incontournable, elle aura besoin d’être soutenue, préparée par tous les moyens possibles et imaginables.

Nous en appelons à l’auto-organisation, dans les entreprises, les bureaux, les écoles, collèges et lycées, à l’université, dans les zones industrielles et commerciales, dans les communes, les quartiers et les places, les ronds-points aussi, à la manière des gilets jaunes… Sachons jouer de tout notre répertoire, de la pétition à la manif, du débat au blocage, de l’affichage à l’occupation, de la grève aux réseaux sociaux… Partout où 3 ou 4 personnes déterminées à ne pas accepter la casse sociale se rencontrent, qu’elles créent un « Comité de défenses des retraites, pour des droits nouveaux » [2]. Très vite elles peuvent localement agir, élargir à 10 ou 15, assurer le succès des manifs départementales et nationales qui ne manqueront pas d’être organisées [3]. Nous pouvons nous appuyer sur la grande disponibilité des retraité.e.s [4]. La grève pourra alors s’étendre. Nous devons gagner la bataille des retraites qui s’annonce !

Article paru dans SUD éducation Lorraine info n°49, novembre 2022


Notes

[1Communiqué intersyndical du 4 octobre 2022 « Déterminé.es pour nos retraites »

[2Ainsi, dans le quartier de Borny à Metz, 1 ouvrière retraitée FO, 1 retraité Sud Educ, 1 élue infirmière municipale PCF CGT, 1 militant PS NUPES, 1 ouvrière intérimaire PSA gréviste sur les salaires en septembre, un parent d’élève ont constitué un comité.

[3A l’instar de la carte de la Moselle où cinquante à soixante communes ont été pointées sur les 725 communes, les militant.e.s d’autres départements peuvent utilement faire ce même travail de pointage qui donne une image du maillage en comités de défense qui serait souhaitable pour atteindre à une réelle efficacité.

[4En Moselle, sur une population de 1 046 543 on décompte 215 497 retraité.e.s. Les catégories « ouvrier.e.s » (229 236) et « employé.e.s » (193 638) représentent 41,4 % . source