GCO : Derrière les intérêts privés se cache une autre réalité à Strasbourg !

Strasbourg (67) |

Le projet du GCO, devenu le COS, a été remis en cause par le collectif GCO NON MERCI depuis plus de vingt ans. Si aujourd’hui les opposants actent le fait que l’A355 de contournement ouest de Strasbourg soit en service, ils restent toutefois attachés à la juste information de la situation sur le trafic routier en direction et autour de l’agglomération strasbourgeoise. De fait, ils n’ont pas la même lecture face à l’enthousiasme affiché par Vinci Autoroutes sur les résultats d’exploitation de son autoroute et relayé dans les médias, ni de l’échec de la requalification de la M35 avancé par certains.

« Le GCO à Strasbourg reste une mauvaise idée à de vrais problèmes qui perdurent toujours. »

COMMUNIQUE du 28 février 2024

GCO NON MERCI a toujours déclaré que le GCO, qui est devenu l’A355 de contournement ouest de Strasbourg, était une mauvaise réponse à de vrais problèmes. En cause : la pollution et la saturation des axes routiers autour de Strasbourg puisque « le désengorgement de l’A35 n’est ni l’enjeu ni l’objectif du GCO », selon les termes mêmes des conclusions de l’enquête publique sur la DUP (Demande d’utilité publique) qui a été signée en 2008 [1]. Deux ans après sa mise en service, cela reste toujours vrai !

En ce début d’année 2024, deux informations ont été communiquées au public via des publications dans la presse :

Tout d’abord, le 12 janvier, une parution exclusive dans le journal La Tribune [2] a révélé les résultats d’exploitation du contournement ouest de Strasbourg en 2023. Ainsi, Vinci Autoroutes s’est félicitée d’une progression de 16 % de la fréquentation de son autoroute avec un trafic moyen journalier de 17 217 véhicules, dont 6 206 camions les jours ouvrés (c’est-à-dire : du lundi au samedi).

Quelques jours plus tard, le 18 janvier, l’Eurométropole de Strasbourg (EMS) s’est félicitée de l’amélioration de la qualité de l’air sur son territoire en 2023 [3], se référant à un pré-rapport publié par ATMO Grand Est (observatoire expert au service de l’action air-climat-énergie et santé). Selon ce document, « les concentrations en dioxyde d’azote et en particules fines sont en baisse sur l’ensemble des stations de mesure. On parle d’une baisse globale autour de 10 % », rapporte l’EMS. Ainsi, ces bons résultats ont fait passer l’Eurométropole sous le seuil qui engendre la mise en place d’une zone à faibles émissions (ZFE) sans pour autant suspendre la mesure réglementaire.
Si cette amélioration est une bonne nouvelle à première vue et nous nous en réjouissons, dans le détail, il convient de la nuancer : quid de la dégradation de la qualité de l’air pour les communes riveraines du GCO ? [4]. Une étude rendue publique en mars 2023 a montré une dégradation de la qualité de l’air de quatre communes [5] et le GCO n’y serait pour rien.

Traitées séparément, ces deux informations (baisse de la pollution et augmentation du trafic sur le GCO) donnent l’illusion que l’autoroute de Vinci contournant Strasbourg améliore la situation pour laquelle elle a été vendue.

Or, derrière l’embellie de façade que présente Vinci de son autoroute, la réalité est moins jolie.

En prenant en considération le résultat d’exploitation du GCO, les données de l’Observatoire de la M35 sur le trafic de la portion urbaine de l’A35 traversant l’agglomération strasbourgeoise et la configuration géographique des territoires concernés par le contournement de Strasbourg [4], rien n’a changé ou presque et les pires craintes de GCO NON MERCI s’avèrent se confirmer.

  • Quid de la pollution qui a augmenté dans les villages riverains de l’A355 ?
  • Quid de la saturation des axes qui reste toujours importante sur la M35 et des nuisances qui ont augmenté en amont du GCO, notamment au nord ?
  • Quid du couloir à camions ?
  • Quid des panneaux indicateurs qui trompent les usagers, notamment les touristes et qui expliquent le pic de fréquentation de l’A355 en juillet 2023, vanté par Vinci ?
  • Quid des intérêts qui sert d’abord et avant tout une entreprise privée ?

Pour mémoire, les promoteurs du GCO nous ont vendu l’autoroute comme « LA » solution pour désengorger l’axe traversant l’agglomération Strasbourgeoise. 

Si l’on prend en compte la hausse significative du trafic sur le GCO en 2023, on peut constater qu’il n’a pratiquement pas diminué sur la M35, dont il est censé délester une partie du trafic.
Ainsi, la baisse du nombre d’immatriculations de véhicules sur l’Eurométropole [3], enregistrée sur la même période, de 2,83 % (soit 7 000 véhicules), joue certes un rôle dans la baisse du nombre de véhicules sur la M35, mais pas tant que ça non plus puisque si on se réfère aux informations sur le trafic au point de comptage de Cronenbourg entre 2019 (avant l’ouverture du GCO) et 2023, la baisse du trafic est égale à 2,7 %, passant de 162 000 à 159 000 véhicules/jour en moyenne [6].

Deux ans après la mise en service de l’A355,
le contournement a confirmé nos pires craintes :

  • augmentation du trafic cumulé de 162 000 pour la seule M35 en 2019 à 176 000 (M35 + A355), soit 14 000 véhicules en plus, correspondant à une hausse de 8,5 % du trafic ;
    A noter qu’en septembre 2023, l’ADEUS dont l’Observatoire de la M35 dépend, constatait déjà une hausse du trafic cumulé : « Ce constat, couplé à la dégradation des conditions de circulation au fur et à mesure du temps, semble indiquer les premiers signes d’un trafic induit » [7].
  • augmentation du nombre du poids lourds (PL) transformant l’axe rhénan au passage de Strasbourg en couloir à camions. Le trafic de transit est estimé au tiers du nombre de camions au passage de Strasbourg. S’il est de 6 206 sur le GCO et représente 90 % du trafic en transit [3], son total cumulé (M35 + A355) est de 20 687 camions, soit un trafic relativement équivalent à celui de 2022, mais qui représente tout de même une hausse de près de 5 000 PL par rapport à la seule M35 en 2019 (16 000 PL) ;
  • une pollution des gaz à effet de serre plus diffuse malgré la baisse enregistrée sur l’Eurométropole avec une dégradation de la qualité de l’air pour les communes riveraines du GCO [5] ;
  • une dégradation de la qualité de vie pour les habitants vivant à proximité du GCO due au bruit provoqué par le trafic routier sur l’autoroute [8].

Tout ça pour ça ?

À l’heure où le ministère des Transports doit encore décider quels seront les projets autoroutiers que l’État va abandonner ou maintenir [9]Un choix qui ne répond pas à la demande de moratoire sur tous les projets d’infrastructure routière que nous portons avec la coalition nationale La Déroute des Routes [10].

Alors que l’Etat s’entête à vouloir imposer le projet de l’A69 entre Toulouse et Castres et confirme le projet de l’A31bis sur son tronçon nord en direction du Luxembourg, prétextant dans les deux cas vouloir désengorger ces axes et offrir une meilleure mobilité complémentaire à d’autres. Un « en même temps » que nous vivons sur Strasbourg avec le déploiement du REME et les extensions du réseau cyclable ou du tram.

Aussi, force est de constater que le GCO vendu au public pour désengorger l’axe traversant l’Eurométropole reste une mauvaise solution à de vrais problèmes qui perdurent. Avec une hausse du trafic cumulé au passage de Strasbourg de 8,5 % par rapport à la seule M35 en 2019, la mise en service du contournement a empiré la situation et provoque un trafic induit indiscutable, et sert uniquement un intérêt privé, celui de Vinci Autoroute. Où est l’intérêt général invoqué dans la DUP ? Nous le cherchons encore.

Une fois encore, nous le répétons : « Le GCO, c’est l’exemple de ce qu’il ne faut plus faire en France » [11].

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P.-S.

Communiqué initialement publié sur le site de GCO Non Merci.


Notes

[1La DUP a été signé en janvier 2008 et validée par le Conseil d’Etat en 2010.

[2A Strasbourg, le contournement autoroutier gagne 20% de fréquentation mais la ville reste saturée
« Deux ans après sa mise en service, l’autoroute de contournement de Strasbourg a battu son record de fréquentation. « En 2023, nous atteignons en moyenne 17.217 véhicules par jour, dont 5.135 poids lourds. Soit 20 % de plus qu’en 2022 », se félicite Marc Bouron, directeur général de Vinci Autoroutes et président d’Arcos, la société concessionnaire du contournement ouest de Strasbourg, qui révèle ces chiffres en exclusivité pour La Tribune. Le record quotidien a été établi le 21 juillet, au cœur des vacances d’été, avec 29 000 véhicules en une journée. »
Fréquentation de l’A355 en 2023 :

  • 17 217 véhicules par jour
  • 5 135 poids lourds. Ramené à une moyenne par jour ouvré qui était de 302 en 2023 (les camions ne circulent pas le dimanche), ce sont 6 206 camions qui ont utilisé le contournement chaque jour de semaine. Le groupe Vinci estime que 90 % des camions en transit qui utilisaient la M35 pour traverser l’agglomération strasbourgeoise avant la mise en service de l’A355 utilisent désormais le contournement.

[4Ces territoires sont : l’Eurométropole de Strasbourg (les communes concernées par l’A355 et les habitants vivant le long de la M35), le Kochersberg et le Ried de la Bruche (les communes riveraines de l’A355).

[5Duppigheim, Ernolsheim, Kolbsheim et Duttlenheim : source 1source 2

[6Le non remplacement des Crit’air 5 et l’anticipation de certaines habitants de l’Eurométropole du déploiement progressif de la ZFE, explique la baisse du nombre d’immatriculation [3].
Pour autant, cette baisse de 7 000 véhicules ne se retrouve pas dans la baisse sur la M35 puisqu’elle est d’à peine 3 000 au point de comptage de Cronenbourg avec 159 000 véhicule/jour (162 000 en 2019 au même point de comptage). Dans le même temps, Vinci a annoncé 17 000 véhicules en moyenne sur son GCO soit + 14 000 véhicules si on cumule la M35 et l’A355. L’augmentation du trafic cumulé sur ces deux axes était de +1,6 % en septembre 2023 selon l’Observatoire de la M35.

[7« Néanmoins, l’on constate depuis mai 2022 que le trafic automobile cumulé sur la M35 et l’A355 dépasse les niveaux de la M35 seule : + 1,6 % en moyenne, soit 2 700 véhicules par jour en plus. Ce constat, couplé à la dégradation des conditions de circulation au fur et à mesure du temps, semble indiquer les premiers signes d’un trafic induit. », note l’ADEUS dans son N°339 de septembre 2023 – source (PDF)

[8De nombreux témoignages d’habitants vivant à proximité du GCO font état d’une dégradation de leur cadre de vie due au bruit que génère le trafic sur l’A355.

[9La liste des projets autoroutiers devant être abandonnés ou maintenus devait être communiquée en janvier 2024. Le remaniement gouvernemental a reporté cette annonce à une date que nous ne connaissons pas.

[10« Nous demandons […] un moratoire sur tous les projets routiers, dans l’attente de leur ré-examen au regard des stratégies fixées par l’État et des enjeux climatiques, écologiques et sanitaires auxquels nous faisons face. »Un moratoire pour dire stop aux projets routiers destructeurs !

[11C’était le 18 décembre 2022 pour les uns an du GCO — source