Des nouvelles du procès du squat la Pigeonne

Strasbourg (67) |

Mardi 18 juin 2024 a eu lieu le procès de la Pigeonne intenté par les propriétaires de la maison afin d’obtenir notre expulsion, au tribunal du registre des commerces et sociétés de Strasbourg. Une trentaine de personnes sont venues pour nous soutenir, grand merci !!

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Pour rappel, La Pigeonne est le squat de vie et d’activités féministe, queer et antiraciste de Strasbourg. C’est un squat autogéré en mixité choisie entre femmes et personnes queers, majoritairement en très grande galère, qui existe depuis février 2020.

Quand nous avons commencé à occuper notre maison, en 2020, ce bâtiment était abandonné depuis au moins 6 ans. Il appartient à une famille d’ultra-riches alsaciens : les Helfrich. C’est une indivision entre 4 personnes de cette famille. Pour situer un peu le contexte familial, il faut savoir que Joseph Helfrich est classé dans les 500 plus grandes fortunes de France (classement Challenges) et en 12ème position du classement des grandes fortunes d’Alsace, avec une fortune estimée à 240 millions d’euros ! En effet, Joseph est actionnaire majoritaire du groupe grands chais de france (qui possède entre autres le domaine Arthur Metz, premier producteur de crémant d’Alsace, mais aussi JP Chenet, Calvet, Grand Sud). Il s’agit du premier groupe français en terme de volume de vinification et d’exportation de vins et spiritueux et deuxième négociant français. Ce groupe exploite 3300ha de vignes en france (quand t’as déjà vendangé 1ha tu sais bien à quel point 3300ha c’est énorme !). Il exploite aussi 1200 employé.e.s et 3000 collaborateurices. Le groupe grand chais de france dépasse le milliard d’€ en terme de chiffre d’affaires annuel ! En général, on ne se rend pas compte de ce que représente 1 milliard. En comparaison, 1 million de secondes font 11 jours tandis que 1 milliard de secondes font 30 ans !!

Par ailleurs, en 2021, Joseph avait eu des "petits soucis" avec la justice puisqu’il avait été mis en examen pour recel d’abus de confiance et recel de violation du secret professionnel par le parquet de Dijon... Son frère, François Helfrich, le plus motivé pour obtenir notre expulsion, possède la société Helfrich, implantée partout en France, qui commercialise des cadeaux pour les comités d’entreprises (12 agences, plus de 200 employé-e-s). On ne connaît pas les intentions de leurs sœurs, à priori en retrait quant à cette procédure (non pas qu’on imagine qu’elles soient contre, simplement on remarque qu’elles se font "discrètes" et ça n’est pas sans rappeler l’organisation sexiste de la société et de la famille bourgeoise blanche).

Aujourd’hui, cette famille de grands riches demande l’expulsion d’un collectif qui a pris soin d’une maison qu’iels laissaient se délabrer sans état d’âme, alors qu’il y a en moyenne 300 personnes à la rue à Strasbourg, dont une majorité de femmes. Malgré nos courriers, les Helfrich ont toujours refusé de nous rencontrer et de discuter, préférant illégalement et vicieusement nous couper l’eau en plein hiver, en février 2022 (voir l’article : https://www.rue89strasbourg.com/eurometropole-acces-eau-squat-pigeonne-227438), puis nous envoyer un huissier quelques mois plus tard. Il n’y a pas eu moyen, à aucun moment, de négocier un quelconque bail avec elleux, ou avec la SCI qui gère le bâtiment, quand certain-e-s habitant-e-s en grande précarité en font la demande. Maintenant iels réclament des sommes ignobles et indécentes à un collectif de personnes galériennes (environ 90 000 euros pour l’occupation de 4 ans). Ne reculant devant rien, parce que les riches ont du culot et que chaque centime compte, ils demandent même à ce que le squat paye leur taxe foncière et des factures impayées qui datent d’avant notre arrivée !!!!

De plus, l’avocat de la partie adverse, Olivier Pernet, tente de nous criminaliser en nous accusant d’une voie de fait sans aucune preuve, ce qui mènerait à des délais d’expulsion courts. En fait, la voie de fait se caractérise par tout comportement portant ouvertement atteinte a des droits personnels. Dans notre cas, l’avocat de la partie adverse nous accuse d’avoir commis une effraction qui aurait permis l’ouverture, ce qui représenterait la fameuse voie de fait. Avec l’aide d’une avocate, Sophie Schweitzer, nous contestons cette voie de fait car nous ne sommes pas entré.e.s par effraction. Nous demandons donc le maintien dans les lieux et, dans le pire des cas, des délais décents afin de trouver des solutions de relogement pour chacun-e.

Ce lieu est notre maison, notre abri, nous y avons construit une vie communautaire solidaire, entre entraide, débrouille et organisation collective. Nous n’avons pas d’autres solutions pour avoir un toit sur la tête et vivre dans de bonnes conditions ; plusieurs d’entre nous sont exilées, sans aucun revenu et en situation de handicap. Face à cela : des propriétaires ultra-riches blanc.he.s qui n’en font rien, n’ont aucun projet et veulent nous expulser...

Nous allons donc défendre le droit inconditionnel à avoir un toit. En Macronie, dans un contexte fachiste, où les ultra-riches sont de plus en plus protégés par l’état, il est urgent de défendre collectivement le droit de vivre dans la dignité pour tou-te-s les pauvres et les galérien·ne·s. Nous revendiquons plus que jamais l’occupation de tous les bâtiments vides par et pour les précaires.

Le délibéré aura lieu le 30 août 2024...