Début de l’enquête parcellaire sur les expropriations

Bure (55) |

Article initialement publié sur bureburebure.info.

Le mois de mars a commencé sur les chapeaux de roue à Bure. Entre la période de plantation des Semeuses dans les champs, la semaine de chantiers sur différents lieux et les préparatifs pour les rencontres printanières d’avril,… s’est ajoutée la procédure d’expropriation lancée par l’ANDRA pour obtenir par la force de nombreuses terres nécessaires à son projet immonde de poubelle nucléaire.

L’ANDRA a récemment déclaré qu’il y aurait 300 propriétaires concerné.es par cette phase d’expropriation (sachant que parfois, il y a plusieurs propriétaires sur un même terrain : héritage partagé dans une famille, SCI, etc), pour 550 parcelles concernées.

Après les recommandés reçus début mars, l’ANDRA donne un mois aux propriétaires concerné.es pour répondre (ou ne pas répondre) à son courrier. Elle cherche à la fois à s’accaparer 100 hectares de parcelles souterraines (tréfonds) et 186 hectares de parcelles de surface :

  • Concernant les tréfonds (sous-sol), il s’agit pour elle d’exproprier à plus ou moins 100 mètres sous terre, mais les propriétaires resteraient entièrement propriétaires de la surface…. avec des déchets en-dessous ! Et comme dédommagement, l’ANDRA propose le rachat des tréfonds à 10 % du prix de l’hectare.
  • Pour toutes les expropriations de surface, il n’y a pas encore de proposition de prix pour le moment.
  • Dans les deux cas, l’ANDRA demande, via son dossier, des renseignements sur l’état civil, les limites cadastrales, des informations sur les locataires qui exploitent le terrain (durée de bail, etc), ainsi que des informations sur ce qui est en présence sur le terrain : puits, barrières, catapultes en résistance à leur projet, et autres élément dont on se sentirait libre de répondre (ou pas).

Ce qui se joue ce mois de mars est particulièrement important en terme de nouvelle étape de résistance concrète face à CIGEO, auprès des exploitant.es concerné.es par les expropriations.

Pour donner plus d’informations, l’ANDRA mène une enquête parcellaire (équivalent enquête publique) du 18 mars au 12 avril dans les communes concernées par des expropriations : Bure, Mandres-en-Barrois, Bonnet, Horville-en-Ornois, Cirfontaines-en-Ornois, Saudron, Gillaumé et Gondrecourt-le-Château (y compris Luméville et Tourailles). Dans les onze dates de permanences, il est possible de consulter le dossier et de donner ses remarques dans le registre, en présence des commissaires enquêteurs : Yves LALLEMAND, Francis GERARD, Jean-Pierre GRANJON, tous retraités et du géomètre qui a travaillé sur le dossier.

À l’annonce de l’enquête parcellaire, début mars, l’ANDRA n’organisait pas de réunion publique sur le sujet.

Le front juridique contre CIGEO a donc décidé d’organiser le 15 mars, à Couvertpuis, puis le 20 mars à Mandres-en-Barrois, des réunions publiques pour s’informer, s’organiser et résister collectivement contre les expropriations et contre CIGEO. Ça n’a pas échappé aux gendarmes qui sont venus noter toutes les plaques d’immatriculation de véhicules présents à ces réunions…

Lorsque l’ANDRA a appris qu’une réunion était organisée par les opposant.es à Mandres, elle a dans la foulée demandé au maire, s’il était possible d’organiser, elle aussi, une réunion publique là-bas… ce qui a été accepté. Et c’est même la Mairie de Mandres qui en a fait la publicité dans les boîtes aux lettres de la commune (oubliant, au passage, de rappeler notre réunion) ! Encore une fois, et après plus de vingt ans, la parole est laissée à l’ANDRA, pour, cette fois-ci, nous laisser avaler en quoi l’expropriation est une bonne chose pour le territoire, et comment il faut bien remplir le dossier d’enquête parcellaire pour donner les bonnes informations à l’ANDRA, avant de perdre son terrain et de voir son territoire ravagé par CIGEO dans les années à venir..

Le 15 mars, le conseil municipal de Mandres a refusé à l’unanimité l’indemnisation proposée par l’ANDRA pour ses parcelles municipales, et va donc vers une procédure d’expropriation.

Afin de rappeler que la vraie réunion sur les enquêtes parcellaires est celle organisée par les opposant.es, il y a eu :

  • une campagne d’affichage déployée dans les villages autour de Bure,
  • du porte-à-porte et tractage pour inviter les personnes concernées par les expropriations aux réunions publiques et leur donner des informations juridiques,
  • de l’affichage de banderoles et d’affiches aux fenêtres en opposition aux expropriations et à CIGEO,
  • de la décoration des nouvelles boîtes de recyclages imposées par la communauté de communes
  • et, plus commun par ici, décoration des bottes de paille sur la route du labo.
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A Bure, l’ANDRA travaille depuis des années son dossier foncier avec le soutien indéfectible d’Emmanuel HANCE, ingénieur reconnu grand spécialiste des chantages affectifs et économiques chez les futurs suicidé.es grâce à sa technique de pression et de harcèlement bien rodée auprès des exploitant.es du coin pour céder les terres à l’ANDRA. D’ailleurs, pour rappel, c’est celui-là même qui avait jeté de l’essence sur des opposant.es assis.es sur une barricade dans le Bois Lejuc en 2017 [1]

Après avoir tenté de maîtriser les agriculteurices de la zone (et de les avoir fichés en tant que « maîtrisé, maîtrisable, difficile à maîtriser » en 2018) ; et depuis que le projet CIGEO a été déclaré d’utilité publique (DUP) et opération d’intérêt national (OIN) en juillet 2022 ; l’ANDRA passe désormais à la vitesse supérieure avec l’expropriation de terrains qu’elle n’a pas pu obtenir à l’amiable, ou sous pression, chantage, harcèlement, les années auparavant.

En fait, les terrains que l’ANDRA souhaite exproprier en ce moment ne représentent pas l’entièreté de ce qui lui manque : encore une fois, elle y va par étape, dans une sorte de guerre d’usure, pour ne pas tout exproprier d’un coup et faire remonter trop la colère paysanne… Diviser pour mieux régner. Le dossier actuel d’enquête parcellaire sur les expropriations de surface concerne les terrains où sont prévues l’installation terminale embranchée (ITE = voie ferrée en projet de réhabilitation entre Gondrecourt et la descenderie de Bure) ; la liaison intersite (route entre Bure et le Bois Lejuc) ; et les expropriations de tréfonds au sud est du Bois Lejuc, c’est-à-dire la vallée de l’Ormançon (le Bois Lejuc appartenant déjà à l’ANDRA depuis l’échange avec l’ancien conseil municipal de Mandres).

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Cette étape d’expropriation correspond à la phase pilote du projet CIGEO ; mais comme on peut le voir sur cette carte, l’objectif final de l’ANDRA est d’obtenir toutes les surfaces en jaune/vert. Donc pour le moment, la plupart des parcelles de Bure, Saudron, Mandres,.. ne sont pas concernées et seront en procédure d’expropriation plus tard. Aussi, parmi les terrains convoités pour CIGEO, le maître d’œuvre n’est pas toujours l’ANDRA (c’est par exemple RTE pour le projet de transformateur électrique).

Aussi, récemment le Sénat a pondu un rapport demandant à l’ANDRA d’étendre les surfaces des galeries, pour que CIGEO puisse à terme recevoir les déchets produits par les 14 projets d’EPR de la relance du nucléaire. On va pas vous le cacher : l’ANDRA a dit oui ! Ça signifierait que les surfaces de tréfonds à obtenir seraient plus importantes, mais elles ne pourraient toutefois pas dépasser le cadre fixé par l’OIN (surface jaune/vert de la carte), et ces infrastructures pourraient certainement mener à la destruction des villages de Bure, Mandres et Saudron.

D’ailleurs, en parallèle de ces procédures d’expropriations – qui ne sont pour le moment que du papier -, on voit depuis quelques mois à Mandres, Luméville, Gillaumé,.. des maisons se faire une à une détruire tandis que de plus en plus de maisons sont à vendre ici ou là. Les villages se vident de manière bien concrète, et pour ceux qui restent et résistent : c’est l’expropriation qui les attend.

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Pour rappel, les expropriations – c’est-à-dire faire passer la propriété d’un particulier ou d’une commune à l’ANDRA – sont une procédure longue de plusieurs mois, avec notamment la possibilité de recours juridiques, mais pas que. L’ANDRA a lancé le début de cette procédure fin janvier, en se fixant un délai approximatif de 20 mois pour y parvenir. Lorsque l’ANDRA avait fait ces annonces, fin novembre, elle avait communiquée au même moment sur son projet d’avancer sur les fouilles archéologiques pour CIGÉO, et également sur la mise en place d’un nouveau démonstrateur à Vecqueville. Début mars, nous nous sommes réjoui.es d’une attaque coupant l’électricité à la forge, et mettant un arrêt pour quelques temps à la production…

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Enfin, à la presque veille de l’ouverture de l’enquête parcellaire, le samedi 16 mars, à la salle polyvalente de Gondrecourt-le-Château, se tenait pour la première année le festival Energik rassemblant marché du terroir (Semeuses, etc), véhicules de collection, stands d’infos, kebab/pizza et concerts. L’évènement était organisé par des opposant.es au projet CIGEO et de nombreux stands d’infos étaient l’occasion de communiquer largement à la veille de l’enquête parcellaire et de construire ensemble une nouvelle étape dans la résistance contre le projet de poubelle nucléaire.

Deux jours plus tard, s’annonçait le début de l’enquête parcellaire :

Rassemblement le premier jour de l’enquête parcellaire

Le premier jour de l’enquête parcellaire, le 18 mars de 9h30 à 12h30, nous nous sommes retrouvé.es à Gondrecourt-le-Château pour un rassemblement devant la mairie, où se tenait l’ouverture de l’enquête parcellaire. Pour cette première date, on voulait marquer une présence dans la ville et montrer une résistance contre les expropriations et contre CIGEO ; ainsi que mettre de la contre-information à disposition.


Notes