De la grenaille pour l’éducation



Blanquer a annoncé dans le JDD [1] le lancement d’un "Grenelle des professeurs" pour revaloriser le salaire des enseignant·e·s et leurs conditions de travail. La bonne blague. Le même Blanquer qui n’a répondu au suicide de Christine Renon et de tant d’autres qu’en enfonçant le clou de sa politique rétrograde. Celui là. Et il va pondre quoi cette fois ?

Car comme le dit Mohamed [2], un prof qui n’en peut plus, « Tout s’est dégradé au cours de ces dernières années : les salaires, les conditions de travail, les suppressions de postes, les fermetures d’écoles, les classes surchargées, des réformes successives visant à casser le service public d’éducation, la fin du bac national, la disparition des mathématiques du tronc commun [comme d’autres matières à cause de la réforme du lycée], la loi confiance, la réforme des retraites, la loi de la transformation de la fonction publique, une médecine scolaire et une médecine du travail inexistantes, des formations pendant les congés, la fin des mutations contrôlées par les CAP, le manque de moyens attribués à l’école inclusive, la dégradation de l’image de l’enseignant dans la société, la casse du lycée professionnel, la privatisation de l’orientation, Parcoursup... ».

Tout n’est pas made in Blanquer, certes, mais tout est dans la droite ligne de la politique ultra libérale et, pour résumer, capitaliste, des différents ministères et gouvernements qui se succèdent. Blanquer y a largement sa part de responsabilité. Car la réalité, c’est vision managériale et verticale, méthodes déshumanisantes et autoritaires du New Public Management, enseignements imposés de savoirs utilitaristes et minimalistes (exit l’esprit critique, l’émancipation et la construction de soi et du collectif), action pédagogique réduite à un protocole, violence institutionnelle des évaluations à outrance généralisées à tous les niveaux, enseignement à distance accélérant l’ouverture au profit des entreprises privées, explosion du recours à l’emploi précaire.

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Alors les salarié·e·s (dont Blanquer exclut d’ailleurs tou·te·s les non-professeurs) sont largement en droit de se demander quel est le nouveau petit paquet de merde que Blanquer va nous glisser au passage. L’objectif affiché est la « revalorisation du métier sur le plan financier mais plus généralement pour améliorer le bien-être au travail », ce qui en soi pourrait déjà, venant de lui, nous faire exploser de rire, si la mort de salarié·e·s n’était pas en question. Cet objectif se décline en « trois grands objectifs, (…) la reconnaissance financière, (…) la coopération entre enseignants (…) et l’ouverture : nous devons moderniser notre système ».

Explication de texte ? La revalorisation salariale sera constituée de miettes au vu de la ridicule enveloppe, rapportée au nombre de personnels concerné·e·s. La coopération entre enseignant·e·s, comme si beaucoup ne le faisaient pas déjà, sera l’occasion de dire à la profession qu’elle ne sait pas faire et doit faire autrement, culpabilisation réitérée. L’ouverture et la modernisation du système scolaire, on connaît déjà par cœur l’esprit réactionnaire de Blanquer pour savoir que ça va rimer à minima avec privatisation et école entrepreneuriale, ainsi que mise au pas voire à pied des personnels contestataires, la répression battant son plein depuis la réforme du BAC (les trois de Melle, les quatre de Bobigny et tous·tes les réprimé·e·s invisibles).
La modernisation du système scolaire selon Blanquer, c’est l’Uber-éducation.

La seule solution est de renverser le système. L’anticapitalisme, ça commence par relever la tête, se syndiquer, refuser les missions de merde et les heures sups, échanger et se syndiquer pour s’organiser... C’est nous qui travaillons, c’est nous qui décidons !

Article paru dans SUD éducation Lorraine Info n°41, octobre 2020.


Notes

[1Le 26 août 2020 : voir ici et .

[2Sur Facebook ici.