Cour des coNtes



Dans l’Éducation nationale, il y a moins d’absences que dans toutes les autres professions, alors pourquoi la cour des comptes a-t-elle cru bon de rédiger un rapport de 60 pages sur cette question ?

Parce que ces absences ne sont souvent pas remplacées. À titre d’exemple, en 2018 seules 21% des heures d’absence ont été remplacées dans le second degré, notamment à cause du protocole de remplacement de courte durée qui interdit de recourir à des TZR pour des absences inférieures à 15 jours.
Par ailleurs, la cour des comptes constate que « trop d’absences liées à l’organisation du service public lui-même amputent les emplois du temps des élèves ». Il s’agit en l’occurrence d’absences dues aux formations continues, aux jurys d’examen, aux réunions institutionnelles... toutes choses dont l’Éducation nationale elle-même est responsable et qu’elle pourrait anticiper. Mais voilà, on le sait toutes et tous, il n’y a pas assez de remplaçant·e·s. Et la cour des comptes le reconnaît puisqu’elle estime à propos de ces absences que « plus du tiers a pour origine le fonctionnement même du système éducatif ». Elle pointe même du doigt le « ministère qui ne conduit pas une politique de prévention structurée » puisqu’il ne met à disposition de ses agent·e·s qu’un·e médecin de prévention pour 16000 agent·e·s, alors que la "norme" est de 1 pour 2500.

Voilà des années que SUD éducation se bat pour le recrutement de personnel·le·s remplaçant·e·s, contre le protocole de remplacement de courte durée, pour une médecine de prévention digne de ce nom, pour que les registres de santé et sécurité au travail soient réellement pris en compte et utilisés... Victoire ?... Face au constat accablant de la cour des comptes, on pourrait s’attendre à tout le moins qu’elle suggère une augmentation du recrutement de personnel·le·s remplaçant·e·s... Raté !
Après avoir tancé l’institution et mis en avant les facteurs risque liés à notre profession en matière de santé (contagion via les élèves, troubles musculo-squelettiques, risques psychologiques), elle propose ni plus ni moins que de nous rajouter du boulot, de nous former pendant les vacances, de nous obliger à nous vacciner, et de nous rendre polyvalent·e·s, tout en renforçant les pouvoirs de coercition des chef·fe·s d’établissement !

La cour des comptes remet ici une couche de prof bashing et tente d’imposer, dans ce début de campagne présidentielle, la vieille rengaine capitaliste de réduction des coûts du service public d’éducation sur le dos des enseignant·e·s.
En résumé, plutôt que de s’en prendre à Blanquer, elle lui sert la soupe pour qu’il puisse continuer à nous serrer la vis.

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Image : Lucile Nabonnand

Article paru dans SUD éducation Lorraine Info n°46, janvier 2022