Avant première : Chroniques d’une Union Locale

Nancy (54) |

L’Union Locale CGT de Nancy fait parler ses adhérent-es pour raconter leurs luttes, pour que l’histoire des lions ne soit pas racontée par les chasseurs

L’Union Locale CGT fait son cinéma

Transmettre nos luttes
Parce qu’il est important de témoigner et de conserver la mémoire des travailleuses et des travailleurs et de leurs combats, l’Union locale CGT de Nancy a souhaité recueillir les interviews d’une dizaine de camarades impliqué.es dans les luttes syndicales locales depuis près de cinquante ans. Cette démarche va se poursuivre dans les mois qui viennent et les 16 heures déjà enregistrées seront enrichies d’une quinzaine d’autres.
La démarche vise à faire s’exprimer les actrices et acteurs des combats sociaux, des luttes.

Point de départ – Radio Lorraine Cœur d’Acier
Le 25 Avril 1980, l’Union Départementale CGT en Congrès à Tomblaine décide de créer une radio de lutte, pour combattre le silence assourdissant des médias sur les conflits sociaux du sud du département. Henri Krasucki participe à ce lancement.
Le plan Giscard/ Barre prévoit la mise à mort des 80 000 emplois de sidérurgistes, la fermeture des mines. Chaque emploi perdu dans ces filières entraîne 4 autres emplois dans les services, le transport, la distribution, le commerce.
La radio est tenue par des militant-es , elle s’appelle Radio Lorraine Cœur d’Acier Nancy, elle est équipée de moyens mobiles pour circuler et enregistrer dans les entreprises et diffuser des reportages issus des grèves, du terrain.

La radio émet de 17 h 30 à 20 h 30, une revue de presse locale, nationale et internationale occupe la première heure. Il peut aussi y avoir des invité-es , des informations données en direct par téléphone, et bien sûr les reportages ramenés du terrain.
C’est aussi l’époque où les cotisations sont payées en espèces, dans les locaux de l’interpro. Alors l’Union Départementale devient l’endroit où il faut être, pour se prendre l’apéro le soir. Une buvette est installée au rez de chaussée, une cinquantaine de militant-es passent chaque soir. Des équipes de service d’ordre, pour protéger l’outil se relayent aussi à l’étage.

La radio est aussi écoutée, très attentivement, par les Renseignements Généraux, la préfecture ne loupe aucune de nos émissions et le 4 juin 1980, Radio Lorraine Cœur d’Acier Nancy est prise d’assaut par les forces de l’ordre. Parmi la cinquantaine de militant.es interpelé.es, une dizaine est maintenue en détention et sera jugées pour violence envers les forces de l’ordre. (Malgré une fouille « virile » la police n’a pas retrouvé l’émetteur dans les locaux, donc pas de jugement pour émission illégale).

Cette nuit violente du 4 Juin 1980 est le point de départ choisi pour illustrer près 50 ans de luttes menées par l’Union locale CGT de Nancy. À partir d’interviews de militant.e.s actif.ves tout au long de ces décennies et d’images d’archives, un premier court métrage fait revivre cette histoire syndicale profondément humaine.

Le choix de travailler avec l’Université et ses professionnels
L’Union locale a demandé l’aide de l’Institut Européen du Cinéma et de l’audiovisuel (IECA) de l’Université de Lorraine, un établissement d’excellence dans le domaine des études cinématographiques et de la formation aux métiers du cinéma. Il est important de signaler ici tout ce que nous devons à cette collaboration avec des partenaires pleinement impliqués dans le succès de notre démarche.

Métallurgie, imprimerie, commerce, l’extraordinaire aventure de Radio Lorraine Cœur d’Acier Nancy, les luttes des femmes dans le syndicat, etc, nos camarades racontent des combats emblématiques, mais aussi leurs engagements, leur fragilité parfois, face à la violence du pouvoir. Parce que leur histoire nourrit encore celle de l’Union locale aujourd’hui, il a aussi été décidé d’enregistrer les réactions que cette histoire suscite chez des militant.es pleinement engagé.es dans les combats d’aujourd’hui.

Un dialogue issu d’expériences éloignées d’une quarantaine d’années, enregistré à la fois dans les studios de l’I.E.C.A. et dans ceux de l’UL CGT de Nancy, s’est mis en place, sur un déroulé d’archives de nos luttes, d’hier et d’aujourd’hui, ici, à Nancy

Le choix d’un travail collectif et ouvert
L’idée de quelques militant-es a alimenté un questionnement sur la mémoire orale qui s’éteint lorsque les camarades âgé-es décèdent.

Ce cercle militant s’est élargi. Un informel « Collectif Mémoire » s’est créé, pour ne pas figer l’activité dans une structure .
Un premier but est défini : stocker de la mémoire.
Le choix de l’audiovisuel nous a conduit.es à frapper à la porte de professionnel⋅les, l’I.E.C.A. Ce lieu unique, nous a semblé des plus opportuns. L’équipe technique, la directrice, ont accueilli notre idée avec enthousiasme, l’idée est devenue projet.
Rédiger une chronologie des luttes, préparer les interviews de 9 militant-es, nous a connecté à notre histoire, pas toujours facile à raconter .

Silence, on tourne !
Les mots de nos Camarades sont sortis, pas dans un mégaphone en pleine rue, mais dans un studio silencieux, face à une caméra. Elles et eux qu’on écoutait si peu, parlent avec des mots simples d’une vie de salarié-e de tous les jours. Ils et elles racontent, le travail des années 70, 80 et après, leur refus de l’arbitraire, la rencontre avec le Syndicat.
Difficile de s’exprimer parfois, ces luttes violentes ont marqué nos camarade, cinq heures d’affrontements avec une compagnie de CRS, puis une nuit d’interrogatoire au boulevard Lobau, et pour certain-es, huit jours de prison. Des 9 emprisonné-es, deux restent vivant-es aujourd’hui : leur récit porte plus loin que leur seul vécu…

Violences policières jusqu’à l’entreprise, combats féministes, occupations d’entreprise, formation syndicale, les séquences s’enchaînent avec une simplicité touchante. Les paroles ne sont pas surjouées, ce sont les images d’archive qui nous rappellent la violence du combat de classe….

Une étape se termine, un premier court métrage de presque 19 minutes est prêt, il nous a procuré beaucoup d’émotions, nous en sommes assez fier.es et nous avons envie de le partager.

 « Chroniques d’une Union Locale » est destiné à la formation syndicale, mais aussi comme sujet de débat, il sera diffusé sur les réseaux et présenté le 4 juin 2025 (date anniversaire de l’assaut des forces de l’ordre contre radio Lorraine Cœur d’Acier Nancy en 1980) à l’occasion d’un apéro convivial, en présence des actrices et acteurs de ces luttes.

Une exposition est consacrée à la nuit du 4 Juin 1980

Avant Première ! CHRONIQUES D’UNE UNION LOCALE Mercredi 4 Juin 2025– 17 h 30 Salle Michel Dinet – Place François Mitterrand - Malzéville

Collectif mémoire
UL CGT NANCY