Nestlé et le miracle de la multiplication des eaux, à Vittel et dans le monde !

Vittel (88) |

Rendons grâce à Nestlé Waters qui a trouvé la solution pour redonner de l’eau aux populations du monde dont elle siphonne progressivement les nappes !

C’est écrit dans son dernier communiqué relayé par Vosges-Matin du 12 juillet : sur 48 sites de Nestlé-Waters dans le monde - dont Vittel- , la multinationale veut « retenir plus d’eau dans la nature que l’entreprise n’en utilise dans le cadre de ses activités ». Cette formule évoque vaguement l’énoncé de la règle verte (« ne pas prélever sur la nature davantage que ce qu’elle peut reconstituer, ni produire plus que ce qu’elle peut supporter sur une année ») mais signifie tout le contraire.

Quelle est la véritable intention de Nestlé et des Etats qui le soutiennent dans cette nouvelle « initiative » ? Profiter au maximum de l’or bleu des nappes souterraines en contribuant à apporter aux habitants une eau venue d’ailleurs, canalisée, recyclée, traitée, au robinet, en goutte à goutte dans les cultures de ses métayers…

A Vittel, Nestlé-ville test, on est déjà servi, avec le projet de pipeline abandonné (merci au Collectif Eau 88), remplacé depuis par un autre projet de canalisation amenant l’eau de la vallée du Vraine et Xaintois aux habitants du secteur de Vittel. Mais visiblement, ces transferts, tous avalisés par l’État et les élu.es locaux, ne suffisent pas à Nestlé qui ajoute à son menu la « restauration du Petit Vair et projet de renaturation ».

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La « porte du désert », symbole de la résistance contre Nestlé

La renaturation du Petit Vair, un projet qui date.

Début 2008, Nestlé décide de construire un entrepôt sur un terrain communal jouxtant l’usine de Vittel. Pour cela, Agrivair, filiale de Nestlé, obtient une procuration du maire de Vittel pour porter le dossier de cession municipale de la parcelle et « faciliter la gestion urgente du permis de construire (point 26). Le défrichement commence sans plus attendre. En octobre, la commune cède la parcelle (point 15). En septembre 2009, Nestlé inaugure l’entrepôt.

Pour étendre son usine, Nestlé a détruit une zone naturelle. Le code de l’environnement lui impose des « mesures compensatoires ». Nestlé propose qu’elles portent sur le ruisseau Petit Vair.
En 2008, l’entreprise réalise une première étude de « reméandrage ».
En 2017, Agrivair dépose un dossier de demande d’autorisation de « restauration » du Petit Vair, remplacé en janvier 2019 par le dossier actuel intégrant de volumineux compléments.
En 2019, une enquête publique a lieu alors que les défenseurs de l’eau sont entièrement mobilisés sur le sujet du pipeline. Ils ne peuvent, au pied levé, entreprendre en si peu de temps une analyse sérieuse de ce nouveau dossier. L’enquête publique, bidon, recueille zéro avis. Le commissaire enquêteur conclut favorablement et le préfet autorise Nestlé à réaliser son projet de « restauration ». Les travaux « compensatoires » peuvent commencer pour de vrai.

La renaturation, une vraie fausse compensation

L’arnaque, c’est que ces travaux portent sur une section du ruisseau traversant des terres appartenant à Nestlé. Sur les deux kilomètres de renaturation, le lit et les berges du Petit Vair sont donc la propriété de ... Nestlé.
Ce point n’a pu échapper aux préfets ni aux maires successifs (Millot, Gaultier, Perry) qui auraient dû exiger des mesures compensatoires en zone communale. Et il y avait de quoi faire : à Vittel, le ruisseau qui traverse la ville est entièrement bétonné et reçoit de multiples égouts. Si l’on en croit le naturaliste vittellois Dominique Defranoux qui alerte sur ce problème depuis longtemps, il s’agit des « égouts de la mairie et de 491 branchements non conformes du centre-ville de Vittel (rapport annuel du délégataire de l’assainissement SUEZ 2016, 2017 et suivants -Conseil municipal point 8) ».
Une fois de plus, les autorités et élu.es servent les intérêts de Nestlé au lieu de servir l’intérêt général. Non contente de siphonner les nappes souterraines, Nestlé s’accapare aussi l’eau de la rivière.

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Sortie des égouts de la mairie de Vittel directement dans le Petit Vair

Un Petit Vair à la santé du verdissement de Nestlé

Cette image de « rivière restaurée », c’est de l’or en barre pour la communication de Nestlé.
En 2013, la multinationale annonce le lancement des travaux de « re-méandrage » du Petit Vair dans un communiqué où Vittel c’est carrément le Pérou. En réalité, les travaux ne débuteront que 6 ans plus tard. (page 34).

En novembre 2019, Nestlé remet ça quinze jours après l’annonce d’abandon du pipeline. Après le scandale du conflit d’intérêt, des suppressions d’emplois, la multinationale cherche à redorer son image avec ce projet qu’elle a sous le coude depuis plus de dix ans. La communication se poursuit en 2020 à travers plusieurs communiqués et conférence de presse (page 9).
Et puis, il y a la Vigie de l’Eau, toujours synchro. Cette association-officine de Nestlé, chargée d’influencer les bambins, est sur le sujet de la renaturation en 2014, en 2018. Après « la protection des nappes souterraines » en 2019, son thème d’activité en 2020, intitulé « eau et paysage », focalise sur le Petit Vair. Avec l’appui financier et les compliments de la ville de Vittel.
La Communauté de communes, qui suit Nestlé, intègre la renaturation du Petit Vair dans son projet de territoire (fiche B4).
La multinationale et ses complices comptent bien sur ce projet pour faire oublier les décharges de BTP et de plastique révélées en 2021 par les lanceurs d’alerte et le Collectif Eau 88. Car Nestlé pilleur, pollueur est par-dessus tout un enfumeur.

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Extraits de la décharge plastique de Nestlé à Saint-Ouen près de Vittel

Pas question de nous bassiner avec des retenues !

Le projet de renaturation du Petit Vair se situe près d’un site de captage de la source Hépar. Derrière ses objectifs soi-disant écologiques, Nestlé pourrait bien avoir en tête un autre scénario alternatif au manque d’eau sur le territoire de Vittel. Une solution complémentaire pour faire durer un peu plus son business : captations dans le ruisseau, retenues d’eau sur les terres accaparées par Nestlé ?

Le « concept de création de retenues d’eau artificielles sur la surface de l’impluvium Nestlé » pourrait ramener jusqu’à 2 milliards et demi de litres d’eau par an était-il précisé dans une contribution à la concertation publique en ligne de janvier 2019.
L’auteur de la contribution en question s’appelle Thomas Léger. Il est membre de Darkstrategic(cyber intelligence/défense), vice-président de l’association Eco-Plaine, président de l’association Blockchain Valley Vittel mystérieusement évaporée depuis quelques mois.
Pour mémoire : Thomas Léger a été introduit dans le milieu vittellois par Bernard Pruvost, ex dirigeant chez Nestlé, président d’Eco Plaine - autre officine de Nestlé -, ex président de la Vigie de l’Eau, époux de Claudie Pruvost prévenue, ainsi que La Vigie, dans le procès pour prise illégale d’intérêt reporté à septembre 2021.

Auto-certification des pilleurs d’eau, caution d’ONG partenaires

Les projets de Nestlé pour « retenir plus d’eau » à Vittel et sur les autres sites dans le monde "s’appuient sur une certification" par l’Alliance for Water Stewardship* (AWS), une organisation qui regroupe, entre autres , Nestlé Danone Coca-Cola, l’ONG WWF qui les cautionne et l’Agence Suisse pour le développement et la coopération (SDC) pilotée en sous-mains par Nestlé. Voilà qui n’est pas rassurant du tout.
Aux plus hauts sommets, Nestlé peut compter sur l’appui du Water Resources Group (2030 WRG), une organisation internationale créée par Nestlé auprès de laquelle Peter Brabeck conserve une influence.
Peter Brabeck, vous vous souvenez ? L’ex PDG, ex Président, Chairman Emeritus du groupe Nestlé ? Il n’a pas perdu de son cynisme. Il spécule et, comme actionnaire de la société Moderna, a déclaré dans une interview que « c’est une chance pour Moderna qu’il y ait le Covid »… Remember this !

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Nestlé continue d’avancer masqué

A Vittel, le scandale d’accaparement de la rivière par Nestlé s’ajoute au scandale de l’accaparement et épuisement des nappes d’eau, au scandale de l’accaparement des terres, au scandale de la prise illégale d’intérêts par une élue et la Vigie de l’eau, au scandale des forages illégaux, au scandale des décharges BTP et décharges de plastique…
Sans oublier les suppressions d’emplois qui vont continuer (4 500 en 1975, 900 aujourd’hui) …
L’Etat cautionne, les élu.es cautionnent, des ONG cautionnent, les syndicats maison cautionnent, la presse aux ordres cautionne, la population cautionne ou se tait…
Quand finiront-ils par comprendre que Nestlé pille, pollue, profite, enfume ? Quand cesseront-ils d’obéir, de servir, de (se) mentir ? Quand se mettront-ils à parler, à penser ?

« Ne vivons plus comme des esclaves » !
Du côté défenseurs de l’eau et de la liberté, la lutte continue !
L’eau pour la vie, pas le profit !