Lettre ouverte aux Recteur et Président·es de collectivités territoriales sur le numérique à l’école

Nancy (54) |

Une lettre ouverte envoyée aux Recteur et collectivités territoriales en charge de collèges et lycées de l’Académie de Nancy-Metz à propos de l’utilisation de l’outil numérique.

Globalement, quand les moyens humains sont réduits année après année, l’outil numérique fait l’objet d’un renouvellement régulier, d’investissements matériels et logiciels coûteux, souvent peu utiles, quasiment toujours propriétaires et privateurs. A l’heure où la question environnementale devient cruciale, SUD Éducation considère qu’il devient indispensable d’investir massivement dans les moyens humains, de réduire les effectifs par classe et au contraire, de faire un usage raisonné du numérique.

Monsieur le Recteur,
Monsieur le Président du Conseil Régional,
Madame et Messieurs les président·es des Conseils départementaux.

le 15 novembre dernier, le Journal officiel a publié une réponse du Ministre de l’Éducation Nationale à une question posée par un député à propos de l’utilisation généralisée de la suite bureautique Microsoft Office chez les personnels et élèves (https://questions.assemblee-nationale.fr/q16/16-971QE.htm). En effet, depuis plusieurs années, Microsoft conduit une stratégie commerciale particulièrement agressive pour conforter son hégémonie sur le marché, notamment en proposant à peu de frais, voire gratuitement, aux personnels, élèves et collectivités territoriale l’utilisation de ses outils.

Dans sa réponse, le Ministre a été très clair, reconnaissant que cette stratégie n’a d’autre objectif que d’accoutumer de futurs consommateurs à l’utilisation des outils de Microsoft. Il reconnaît en outre que les outils "en ligne" de Microsoft, comme ceux de Google, proposés pour les personnels, élèves et établissements scolaires ne respectent pas la RGPD puisque les données issues de leur utilisation transitent par des serveurs hors de l’Union européenne. Le Ministre rappelle enfin qu’il a été demandé de cesser tout déploiement de solutions logicielles qui ne respectent pas la RGPD, notamment les solutions de ces deux entreprises américaines.

Or, dans notre académie, comme dans l’ensemble de la région Grand-Est, l’ENT "Mon bureau numérique" propose les outils bureautiques de Microsoft en ligne dont l’utilisation tend à se généraliser. Si l’interface laisse entendre à l’utilisateur que les documents sont enregistrés sur les serveurs de Mon bureau numérique, nous n’avons pas la garantie que des données personnelles ne soient à aucun moment transmises à Microsoft ou à ses partenaires commerciaux, dans la mesure notamment où le code source de ces logiciels propriétaires et privateurs est fermé et ne permet aucun contrôle. Il ne nous semble donc pas que nos collectivités territoriales de rattachement aient suivi la consigne nationale rappelée par le Ministre.

Pourtant, aujourd’hui, dans la majorité des domaines, les outils numériques alternatifs open source sont tout aussi performants, voire plus légers, et permettent une utilisation équivalente aux outils propriétaires, que ce soit LibreOffice sur les postes de travail ou bien Collabora ou OnlyOffice qui s’installent sur serveur et pourraient être intégrés à MBN dans le respect de la RGPD.

De manière plus générale, les logiciels libres de même que les systèmes d’exploitation libres, permettent, outre leur transparence et la sécurité qu’ils apportent, de prolonger la durée de vie des machines et d’éviter leur remplacement à l’heure où il devient urgent de réduire l’empreinte carbone de nos établissements. Nous rappelons que le secteur du numérique a un impact environnemental au moins aussi élevé que celui du secteur aérien, dont 78% est lié à la production de nouveaux équipements.

Aussi, tant pour des questions d’éthique, de respect de la vie privée que d’impact environnemental, nous souhaitons savoir si vous comptez engager nos établissements dans une généralisation de l’usage de systèmes informatiques économes en énergie, prolonger leur durée de vie, notamment en favorisant les solutions libres. S’agissant des lycées, notre interpellation concerne également le dispositif "lycée 4.0" qui nous semble aller à l’encontre de ces principes et qui n’a jamais fait l’objet d’un bilan pédagogique ni environnemental. En un un mot, nous souhaitons savoir de quelle manière nos autorités de tutelle prennent la mesure de la nécessité urgente d’un usage raisonné du numérique.

Dans l’attente de votre réponse, nous vous prions de croire, Monsieur le Recteur, Madame et Messieurs les président·es de collectivités territoriale dans notre profond attachement au service public d’éducation.

Le syndicat SUD Education Lorraine