Depuis plusieurs décennies, les gouvernements successifs en France ont mené des politiques néolibérales, travaillant au profit de minorités possédantes et contre l’intérêt général. Ces politiques se sont amplifiées ces dernières années, et se sont doublées de véritables attaques sur le plan social qui ont aggravé considérablement les conditions de vie matérielles des plus pauvres et des précaires dans notre pays. Au cours des deux mandats de Macron, cette politique néolibérale de casse de notre modèle social s’est accélérée, provoquant des réactions populaires que les gouvernements successifs ont réprimées en modifiant une législation toujours plus liberticide et grâce au recours par les « forces de l’ordre » à une violence et une brutalité inédites. En point d’orgue, ces forces répressives ont adopté cet été un comportement factieux, menaçant l’état et exigeant de pouvoir continuer impunément les violences, voire des tentatives de meurtres, principalement dirigé(e)s contre des personnes racisées. Le lit de l’extrême droite est fait, son arrivée rapide au pouvoir est probablement inéluctable, et ne le serait-elle pas, la politique d’extrême droite est déjà à l’œuvre [1].
Le niveau de répression inégalé dans les dernières décennies atteint peut-être aujourd’hui ce qu’il a pu être à l’époque coloniale, les mandats de Macron s’illustrent singulièrement avec une escalade invraisemblable.
- Le passage dans la loi ordinaire d’un certain nombre de dispositions issues du régime d’état d’urgence qui limitent les libertés individuelles (Macron 1, 2017) comme les mesures de surveillance individuelle ou les dispositions relatives aux perquisitions administratives (pouvant être décidées sans l’aval d’un magistrat) et aux assignations à résidence.
- Le mouvement des gilets jaunes en protestation à l’augmentation des taxes sur les produits pétroliers et à la suppression de l’impôt sur la fortune et l’usage massif, pour réprimer ce mouvement, d’armes dites non létales en France (LBD, grenades de désencerclement, grenades assourdissantes), mais considérées par la règlementation internationale comme armes de guerres [2]. Et plus qu’un symbole, pour la première fois depuis 60 ans, le 8 décembre 2018, les blindés de la gendarmerie sont utilisés pour réprimer une manifestation à Paris.
- Le projet de réforme des retraites Macron 1 a suscité de novembre 2019 à mars 2020 une très forte opposition populaire qui a été réprimée par un recours massif par les forces d’oppression aux verbalisations et aux gardes-à-vues abusives dans le but de décourager l’action militante.
- La gestion autoritaire de la pandémie de COVID19, avec l’établissement d’un état d’urgence sanitaire (contesté par le Défenseur des droits [3] et par la Commission nationale consultative des droits de l’homme), la mise en place d’auto-attestations de sortie débiles ayant conduit à des verbalisations massives, mais aussi à des actes de violences policières à l’encontre de contrevenant·es.
- La loi dite Sécurité globale qui instaure les caméras piétonnes, l’usage de drones, la reconnaissance faciale, les sanctions en cas d’identification des membres des « forces de l’ordre » (délit de diffusion malveillante d’images).
- L’opposition à la réforme des retraites Macron 2, réprimée avec une brutalité nouvelle après l’entrée dans la contestation de la jeunesse à la suite du passage en force au parlement par le gouvernement Borne grâce au recours encore une fois au 49.3.
- La brutalité sauvage dont ont fait preuve les forces de répression pour disperser le mouvement d’opposition aux megabassines de Sainte Soline. Des armes telles que les LBD et grenades diverses ont été utilisées dans des conditions interdites (depuis des quads en mouvement). Il est d’ailleurs utile de s’arrêter un instant sur les megabassines, tant ce cas illustre la manière de gouverner dans notre pays. Il s’agit de prélever dans les nappes phréatiques en profondeur de l’eau potable pour alimenter des réservoirs ayant une surface immense. Le cocktail est remarquable : le fond des bassines est en plastique et des microparticules passent dans l’eau, l’évaporation est exceptionnelle, puisque c’est un phénomène physique de surface, l’eau se charge en virus et bactéries présentes dans les pluies, et la stagnation est favorable à la prolifération de cyanobactéries, d’algues et de micro-organismes. Aucun doute, le bilan est positif. Et si l’on feint d’ignorer ces aspects, l’Espagne compte depuis des années plus de mille de ces bassines et a abandonné ses projets d’extension. Nombreuses sont d’ailleurs celles qui sont aujourd’hui vides [4]. Enfin, le gouvernement s’est appuyé pour défendre son projet sur un rapport du BRGM qui a lui-même reconnu avoir « oublié » de tenir compte des effets du réchauffement climatique dans son étude, en particulier la diminution des approvisionnements naturels des nappes phréatiques [5].
- Cet été, usant du prétexte des JO 2024, la surveillance électronique par le biais du contrôle des appareils connectés a été votée et place la France aux côtés de démocraties telles que la Chine, le Pakistan ou l’Egypte [6].
- « A Nanterre, le 27 juin 2023, Nahel Merzouk, 17 ans, est abattu par la police d’une balle dans la poitrine lors d’un contrôle routier » [7]. Le policier meurtrier est placé en détention provisoire et la cagnotte de la honte est mise en ligne par l’extrême droite pour lui venir en aide... peut-être également pour le féliciter pour son acte de bravoure ? Alliance et UNSA Police publient un tract à la tonalité abjecte : « Hordes sauvages », « nuisibles », « chienlit », « les policiers sont au combat car nous sommes en guerre. Demain nous serons en résistance et le gouvernement devra en prendre conscience » [8]. L’un des policiers auteur de ces actes est placé en détention préventive. Le directeur général de la police nationale Frédéric Veaux, soutenu par le préfet de police de Paris Laurent Nuñez [9] et par Gérald Darmanin le ministre de l’intérieur déclare qu’« un policier n’a pas sa place en prison » et demande la mise en place d’un statut juridique d’exception (clément, on s’en doute) pour les policiers, fussent-ils auteurs d’actes aussi dramatiques en cette circonstance qu’une tentative de meurtre. Une action collective au niveau national, consistant à se mettre en arrêt maladie frauduleux [10], sera mise en place par de nombreux policiers sans aucune condamnation verbale du gouvernement ni aucune sanction à leur encontre. La justice est la complice de cette répression. A la suite des émeutes qui ont suivi le meurtre de Nahel, les peines de prison en comparution immédiate ont conduit à « des condamnations dans 95% des affaires, de la prison ferme dans 60% des cas », ce dont s’est félicité le Garde des Seaux qui avait passé ses consignes à la justice « indépendante » [11]. Les militants écologistes sont visés de même, qualifiés d’éco-terroristes par Darmanin, ils sont venus faire la guerre selon Macron [12]. Un exemple local : Loïc est condamné à un an de prison ferme le 27 juillet 2023… pour avoir écrit ACAB sur une camionnette de gendarmerie, déguisé en moine, à Sainte-Soline [13].
La police française a sombré dans une spirale infernale qui l’emporte vers toujours plus d’excès, toujours plus d’abus de pouvoirs, toujours plus de violence gratuite et de racisme [14]. La prolifération du slogan ACAB résume le sentiment de cette évolution. All cops are bastards. Tous les flics sont des bâtards. Non pas que leur filiation familiale individuelle soit questionnée, la bâtardise vient d’une trahison. Ils sont le bras armé du pouvoir, ils sont issus en grande majorité des classes populaires auxquelles ils ne cessent de s’en prendre avec violence, avec haine. Ils sont traitres à leur classe. Bâtards [15].
Signature : Qeqertaq
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