Déconstruire une idée fausse d’extrême droite : la grosse parano du « grand remplacement »



De Zemmour à Pécresse en passant par Le Pen, la campagne électorale revient régulièrement, via les médias, sur ce thème martelé par l’extrême droite, bien qu’atténué par l’invasion russe en Ukraine, du « grand remplacement ». On peut d’ailleurs remarquer à cette occasion que médias et gouvernements sont à l’unisson pour différencier bon·ne réfugié·e et mauvais·e migrant·e, en fonction de la couleur de peau ou de la religion supposée.

Et donc cette grosse parano du « grand remplacement ». C’est l’idée selon laquelle, si nous n’arrêtons pas le flot de l’immigration, dans quelques années, les blanc·he·s seraient minoritaires en France. Cette affirmation part du principe que la société française se diviserait en deux : d’un côté les blanc·he·s, de l’autre les non blanc·he·s, comme si l’aspect de la peau résumait à lui seul la personnalité de chacun·e et l’identité des groupes humains. De fait, la France accueille depuis longtemps beaucoup d’européen·e·s de l’est et du sud en quête d’asile et de travail. Au fil du temps, des personnes venues d’autres continents sont venues s’installer dans l’hexagone. Ils et elles s’y sont implanté·e·s, ont trouvé un travail, ont appris le français et ont également apporté des éléments de leur culture. Les mêmes qui fustigent aujourd’hui les musulman·ne·s (hier ils disaient les « arabes ») et/ou les juif·ve·s, se sont jadis attaqués aux polonais·es, aux italien·ne·s, aux portugais·es. Aujourd’hui ils en parlent moins, sous prétexte que la culture catholique gommerait les différences, préférant s’attaquer aux musulman·ne·s. C’est d’abord laisser croire que tous les arabes seraient musulman·ne·s (et dans leur tête ça signifie potentiellement terroristes). C’est laisser croire que les religions sont des ensembles figés qui n’évoluent pas. C’est enfin laisser croire que les musulman·ne·s ne seraient pas un groupe d’individus aussi varié·e·s que l’est le prétendu groupe des blanc·he·s. Quant à l’antisémitisme, il s’appuie sur les même ressorts.

Distinguer les blanc·he·s des non-blanc·he·s est absurde. C’est créer de toute pièce un clivage entre deux prétendus groupes irréconciliables, contribuant à alimenter un climat de haine et à accentuer des discriminations déjà existantes, là où peut se développer l’entraide, le sentiment d’appartenir à un même groupe humain, mieux, à la même classe sociale, à la fois diverse et unie.

Encore une fois, chercher des boucs émissaires faciles, c’est chercher un échappatoire illusoire et mortifère. C’est avoir peu de confiance en la lutte de classe anticapitaliste et autogestionnaire. L’ennemi n’est pas celle ou celui qui n’a pas la même couleur de peau ou la même religion, l’ennemi est bien le patron qui nous exploite.

Article paru dans SUD Éducation Lorraine Info n°47, avril 2022.